par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. com., 13 décembre 2011, 11-10699
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Cour de cassation, chambre commerciale
13 décembre 2011, 11-10.699

Cette décision est visée dans la définition :
Société




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu les articles L. 210-6 et R. 210-5 du code de commerce et l'article 6 du décret n° 78-704 du 3 juillet 1978 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant qu'elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits ; qu'il résulte des deux autres textes que la reprise de tels engagements ne peut résulter que soit de la signature par les associés des statuts auxquels est annexé un état des actes accomplis pour le compte de la société, soit d'un mandat donné par les associés avant l'immatriculation de la société à l'un ou plusieurs d'entre eux, ou au gérant non associé, et déterminant, dans leur nature ainsi que dans leurs modalités, les engagements à prendre, soit encore, après l'immatriculation, d'une décision prise, sauf clause contraire des statuts, à la majorité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se prévalant d'un bon de commande signé le 11 mai 2006 par M. X... pour le compte de la société X..., antérieurement à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, intervenue le 20 juin 2006, la société Komatsu France (société Komatsu) a assigné celle-ci en paiement d'une somme correspondant au prix d'une partie du matériel d'exploitation forestière visé par le bon de commande ; que la société X... a contesté être débitrice de la somme réclamée en l'absence de reprise régulière de cet engagement ;

Attendu que pour accueillir la demande de la société Komatsu, l'arrêt retient que la société X... n'a pas seulement procédé à une reprise implicite de l'engagement du 11 mai 2006 en procédant à un remboursement partiel de la tête d'abattage le 22 juin 2006 ; qu'il ajoute qu'en effet, cette société a souscrit le 27 juin 2006, postérieurement à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, un contrat de crédit-bail destiné à financer le matériel objet de la commande ; qu'il relève encore que de la signature de ce second contrat découle la reprise par la société X... de l'engagement du 11 mai 2006 envers la société Komatsu, le crédit-bail se rattachant par un lien nécessaire au contrat assurant la fourniture du bien financé ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans avoir constaté l'accomplissement régulier de l'une ou l'autre des formalités précitées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne la société Komatsu France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 2 500 euros à la société X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils pour la société X....

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR, confirmant le jugement, condamné la SARL X... à payer à la S. A. KOMATSU FRANCE la somme de 40. 365 € outre intérêts conventionnels à compter du 1er février 2007, date de la mise en demeure, ainsi que la somme de 4. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

AUX MOTIFS QUE le 31 janvier 2006 Monsieur Michel X... a commandé à la société KOMATSU FRANCE une abatteuse Valmet type 941 avec kit de transformation de la tête d'abattage 370. 1 en 370. 2 moyennant le prix de 350. 000 € H. T. ; que, bien que Monsieur X... ne se fut engagé que sous réserve d'obtenir un financement, l'abatteuse lui a été livrée le 1er mars 2006, avec sa tête d'abattage et son kit de transformation, alors que le financement « était en voie de finalisation » ; que par la suite, Monsieur X... n'a pu obtenir un financement à hauteur de 350. 000 € ; que le 11 mai 2006, la SARL X..., représentée par Monsieur Michel X..., a signé un bon de commande n° 10765 auprès de la société KOMATSU FRANCE portant les mentions suivantes : « Annule et remplace le bon de commande n° 12624 du 31 janvier 2006. Combiné d'abattage conforme : 305. 000 € H. T. à la facture pro forma du 16 janvier 2006 financé crédit-bail SODELEM. Complément tête d'abattage 370. 2 : 45. 000 € H. T. financement en huit mensualités par la SARL X...-6. 727, 50 € TTC) au 20 de chaque mois » ; qu'il résulte de ce bon, signé également par la société KOMATSU FRANCE, que Monsieur X... et la société KOMATSU FRANCE se sont accordés pour anéantir la vente du 31 janvier 2006 que ce dernier ne pouvait financer et pour passer un nouvel acte portant sur le même matériel au profit de la société en formation X..., représentée par Monsieur X... qui allait en devenir le gérant et qui allait d'ailleurs consentir la location-gérance de son fonds à cette société ; que la société X... expose qu'elle n'a été immatriculée au Registre du commerce et des sociétés que postérieurement à cette commande, de sorte que, le 11 mai 2006, elle ne disposait pas de la personnalité morale ; qu'elle indique seulement que « sauf à démontrer la reprise de cet acte particulier par la société lors de sa formation, il ne saurait engager juridiquement la SARL X... » ; qu'il ressort effectivement du RCS que la SARL X... a été immatriculée le 20 juin 2006 ; que la SARL X... n'a pas seulement procédé à une reprise implicite de l'engagement du 11 mai 2006 en procédant à un remboursement partiel de la tête d'abattage le 22 juin 2006 ; qu'en effet, cette société a souscrit le 27 juin 2006, postérieurement à son immatriculation au RCS, à un contrat de crédit-bail destiné à financer le matériel objet de la commande du 11 mai 2006 ; que de la signature de ce second contrat découle la reprise par la SARL X... de l'engagement du 11 mai 2006 envers la société KOMATSU FRANCE, le crédit-bail se rattachant par un lien nécessaire au contrat assurant la fourniture du bien financé ; que, si la facture adressée le 19 mai 2006 par la société KOMATSU FRANCE à la société de crédit-bail SODELEM pour un montant de 305. 000 € H. T. fait état du combiné d'abattage « avec tête de façonnage Valmet 370. 1 » et « kit pièces de modification 370. 1 en 370. 2 », c'est manifestement par erreur que cette tête d'abattage et ce kit de modification n'ont pas été retirés du libellé de la facture puisque cette facture fait expressément référence à la commande du 11 mai 2006 par laquelle les tête d'abattage et kit de modification avaient déjà été vendus à Monsieur X... pour le compte de la SARL X... ; que dès lors, c'est en vain que la SARL X... fait valoir, non sans une certaine mauvaise foi, que les tête d'abattage et kit de modification ne lui ont pas été vendus mais ont été vendus à la société SODELEM ;

ALORS D'UNE PART QUE la reprise par une société immatriculée des engagements pris en son nom ne peut être implicite et ne saurait résulter du remboursement effectué par la société ; qu'en décidant que la SARL X... n'a pas seulement procédé à une reprise implicite de l'engagement du 11 mai 2006 en procédant à un remboursement partiel de la tête d'abattage le 22 juin 2006, la Cour d'appel a violé les articles L. 210-6 du Code de commerce, 1843 du Code civil et 6 du décret du 3 juillet 1978 ;

ALORS D'AUTRE PART QUE la reprise des engagements souscrits au nom d'une société en formation ne peut résulter, après immatriculation de celle-ci, que d'une décision non équivoque prise par les associés, la reprise ne pouvant pas être implicite ; qu'en décidant que la SARL X... n'a pas seulement procédé à une reprise implicite de l'engagement du 11 mai 2006 en procédant à un remboursement partiel de la tête d'abattage le 22 juin 2006, qu'elle a souscrit le 27 juin 2006, postérieurement à son immatriculation au RCS, un contrat de crédit-bail destiné à financer le matériel objet de la commande du 11 mai 2006, que de la signature de ce second contrat découle la reprise par la SARL X... de l'engagement du 11 mai 2006 envers la société KOMATSU FRANCE, le crédit-bail se rattachant par un lien nécessaire au contrat assurant la fourniture du bien financé, la Cour d'appel qui n'a pas constaté qu'était établie l'existence d'une décision non équivoque prise par les associés et qui retient que la reprise a été implicite, a violé les articles 1843 du Code civil, 6 du décret du 3 juillet 1978 et L. 210-6 du Code de commerce ;

ALORS, ENFIN, QU'en retenant que si la facture adressée le 19 mai 2006 par la société KOMATSU FRANCE à la société de crédit-bail SODELEM pour un montant de 305. 000 € H. T. fait acte du combiné d'abattage « avec tête de façonnage Valmet 370. 1 » et « kit pièces de modification 370. 1 en 370. 2 », c'est manifestement par erreur que cette tête d'abattage et ce kit de modification n'ont pas été retirés du libellé de la facture puisque cette facture fait expressément référence à la commande du 11 mai 2006 par laquelle les tête d'abattage et kit de modification avaient déjà été vendus à Monsieur X... pour le compte de la SARL X..., sans préciser en quoi le fait que la facture du 11 mai 2006 indiquait que les tête d'abattage et kit de modification avaient déjà été vendus à Monsieur X... pour le compte de la SARL X... établissait l'erreur manifeste, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.



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Société


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