par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 1, 28 novembre 2012, 12-30090
Dictionnaire Juridique

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Cour de cassation, 1ère chambre civile
28 novembre 2012, 12-30.090

Cette décision est visée dans la définition :
Adoption




LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, qui est recevable :

Vu la coutume internationale ;

Attendu que les actes établis par une autorité étrangère et destinés à être produits devant les juridictions françaises doivent au préalable, selon la coutume internationale et sauf convention internationale contraire, être légalisés pour y produire effet ;

Attendu que l'adoption simple par Mme X... de l'enfant B... C..., né le 5 août 2001 en Haïti, a été prononcée le 9 mars 2010 et transcrite, le 24 mars 2010, sur les registres de l'état civil haïtien ; que l'adoptante a saisi le tribunal de grande instance d'une requête en adoption plénière et a produit un consentement à une adoption plénière non légalisé recueilli, le 24 août 2009 ;

Attendu que, pour prononcer l'adoption plénière de l'enfant, l'arrêt retient, d'abord, que l'article 370-3 du code civil n'impose aucune forme au consentement de sorte que l'exigence de légalisation ajoute à ce texte, ensuite, que cette exigence est nouvelle, enfin, que l'adoptante n'en était pas spécialement informée et qu'il convient en conséquence d'examiner l'acte en lui-même afin de déterminer, en dépit de son absence de légalisation, la force probante qui peut s'y attacher ;

Qu'en faisant ainsi produire effet en France à un acte non légalisé établi par une autorité étrangère, en l'absence de Convention internationale contraire, la cour d'appel a méconnu la coutume internationale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par le procureur général près la cour d'appel de Rouen.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du 22 mars 201 1 en toutes ses dispositions exceptée celle relative aux dépens, jugement qui prononçait l'adoption plénière de B... C... par Madame Isabelle X... :

AUX MOTIFS QUE l'article 370-5 du Code Civil issu de la loi du 6 février 2011 prévoit expressément qu'une adoption simple prononcée à l'étranger peut être convertie en adoption plénière si les consentements requis ont été donnés en connaissance de cause, que l'article 370-3 alinéa 3 du même code édicte que le consentement doit être libre, obtenu sans contrepartie, après la naissance de l'enfant et éclairé sur les conséquences de l'adoption, en particulier s'il a été donné en vue d'une adoption plénière, sur le caractère complet et irrévocable de la rupture du lien de filiation préexistant, que ni l'article 370-5 ni l'article 370-3 ne comportent d'exigence de forme quant au consentement donné par le représentant légal, que s'agissant d'un consentement donné dans un état qui ignore l'adoption entraînant la rupture du lien de filiation préexistant, aucun formalisme ne peut être exigé par la loi de cet état, que dans ces conditions, l'exigence de légalisation de l'acte comportant consentement à l'adoption plénière conformément au droit international public posée par le Ministère Public ajoute aux textes des articles 370-3 et 370-5 du Code Civil, que l'exigence de légalisation est nouvelle puisqu'elle n'est invoquée par le Ministère Public concernant les enfants d'Haïti que depuis 2010, que l'appel du Ministère Public tend à rendre cette exigence rétroactive puisque la procédure haïtienne s'est terminée par le jugement du tribunal civil de Port au Prince le 9 mars 2010, transcrit à l'état civil le 24 mars 20 10 et que l'acte de consentement du 24 août 2009 non légalisé, sont antérieurs à la formulation de la condition de légalisation de cet acte ; que si la Cour de Cassation a énoncé que la légalisation des actes d'état civil étrangers destinés à être produits en France continue à être exigée en vertu de la coutume internationale, l'acte dressé afin de constater un consentement n'est pas un acte d'état civil et la réalité d'une pratique répandue des Etats en la matière n'est pas démontrée, que même à admettre l'exigence de légalisation, la requérante qui n'était pas informée de la nécessité de se conformer à cette formalité puisque la règle est postérieure à l'acte, n'a pu s'y soumettre ou former un recours en cas de refus de cette formalité, qu'il convient d'examiner l'acte et de déterminer la force probante qui peut s'y attacher en dépit de sa non légalisation, que Madame X... produit quatre actes établis par Jean Bello Z... suppléant, juge de paix de la commune de Petionville, que l'acte non légalisé du 24 août 2009 dans lequel Marie Yolène A... déclare donner son consentement à l'adoption de son fils par Isabelle X... étant précisé " de par cette adoption, les liens biologiques antérieurs de l'enfant se trouvent complètement rompus et se crée une filiation adoptive " porte las signature de Jean-Bello Z... qui est la même que sur les trois autres actes signés par lui qui portent mention de légalisation de sa signature par le substitut commissaire du gouvernement ; que le consentement spécifique du 24 août 2009 n'est pas un doublon de ceux donnés le 28 août 2009 et le 17 novembre 2009 pour une adoption simple conformément à la loi haïtienne qu'il signifie expressément que la mère de l'enfant et sa seule représentante légale en raison du décès du père, a expressément consenti à une adoption par Madame X... qui a pour effet de rompre complètement et partant de manière irréversible la filiation qui l'unissait antérieurement à l'enfant ; que le consentement recueilli le 24 août 2009 répond aux conditions de fond de l'article 370-3 du Code Civil et établit que c'est en parfaite connaissance de cause et complètement informée des conséquences quant à la rupture complète et définitive de lien de filiation qui l'unissait à l'enfant B..., que Marie-Yolène A... a consenti à l'adoption, qu'il est de l'intérêt supérieur de l'enfant de bénéficier en France d'une adoption plénière irrévocable dans ses effets

Alors que en considérant que l'exigence de légalisation serait " ajouter " aux textes des articles 370-3 et 370-5 du Code Civil, que cette exigence serait nouvelle comme requise depuis l'année 2010, ne concernerait que les actes d'état civil et qu'il y aurait lieu d'examiner la force probante de l'acte nonobstant sa légalisation, la Cour d'Appel a violé les règles de droit international public, qu'elle a également violé les règles internationales sur la forme du consentement à l'adoption, qu'en outre, elle a dénaturé l'acte du 24 août 2009 et a violé les dispositions des articles 370-3 et 370-5 du Code Civil sur le contenu du consentement donné en vue d'une adoption plénière en indiquant que les mentions de cet acte signifiait que la mère avait expressément consenti à une adoption qui avait pour effet de rompre complètement et partant de manière irréversible la filiation qui l'unissait antérieurement à l'enfant.



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Adoption


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.