par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
ADOPTION DEFINITION
Dictionnaire juridique
Définition de Adoption
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Le mot "adoption" qui nous vient du droit romain, désigne une institution par laquelle une personne, mineure ou majeure dite l'"adoptée", entre dans la famille d'une autre personne, dite "l'adoptant". La loi du 17 mai 2013 n'a pas modifié le fait que soient reconnues deux types d'adoption :
La Loi n°2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique a modifié en partie les dispositions du Code cvil, du code de la santé publique, du code de l'action sociale, et du code de la sécurité sociale.
Il est trop tôt pour envisager d'établir dès maintenant une analyse des changements intervenus et des règles nouvelles concernant notamment la procréation assistée, l'insémination artificielle, le problème de la conservation, de la recherche et du transfert des embryons, le traitement de l'infertilité, la conservation et l'utilisation des gamètes, la situation juridique des tiers donneurs, les prélèvements et les dons d'organes, l'accès aux données, le droit de l'adoption, les règles relatives à l'autorité parentale et les droits de l'enfant.
Il convient donc de lire les informations ci-après en tenant compte de la Loi ci-dessus sur la bioéthique qui a apporté des nouveautés notamment en matière d'adoption et d'autorité parentale.
La Loi n°2013-404 du 17 mai 2013 promulguée dès le lendemain, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, a modifié les dispositions de fond qui jusqu'à cette date régissaient l'adoption. Elle permet aux personnes homosexuelles d'avoir accès au mariage : elle a donc fixé un ensemble de nouvelle règles qui tiennent compte de l'esprit dans lequel ces dispositions ont été votées. Dans un avis du 22 sept. 2014 la Cour de cassation a estimé que le recours à l'assistance médicale à la procréation, sous la forme d'une insémination artificielle avec donneur anonyme à l'étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l'adoption, par l'épouse de la mère, de l'enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l'adoption sont réunies et qu'elle est conforme à l'intérêt de l'enfant (Avis n°14-70007 du 22 septembre 2014, Madame Le Cotty Conseiller rapporteur et avis de M. Sarcelet, Avocat général, Bicc n°813 du 15 décembre 2014 et Legifrance). Décision dans le même sens dans le cas de l'adoption par l'époux du père : le recours à la gestation pour autrui à l'étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l'adoption, par l'époux du père, de l'enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l'adoption sont réunies et si elle est conforme à l'intérêt de l'enfant (1ère chambre civile 5 juillet 2017, pourvoi : 16-16455, BICC n°874 du 15 janvier 2018 et Legifrance.
La nouvelle législation sur le mariage pour tous, dispose notamment :
La Circulaire du Ministre de la Justice du 29 mai 2013 (BOMJ n°2013-05 du 31 mai 2013) a tiré les conséquences sur les règles de l'adoption de la loi sur le mariage des personnes de même sexe. La Circulaire rappelle que le nouvel article 6-1 du Code civil, énonce que « Le mariage et la filiation adoptive emportent les mêmes effets, droits et obligations reconnus par les lois, à l'exclusion de ceux prévus au titre VII du livre 1er du présent code, que les époux ou les parents soient de sexe différent ou de même sexe. ». La filiation d'un enfant à l'égard d'un couple de personnes de même sexe ne peut que résulter d'un jugement d'adoption et pas de la reconnaissance par la compagne de la mère qui accouche. De même la présomption de paternité ne peut être étendue à l'épouse de la mère qui accouche. Consulter sur ce point la décision n°2013-669 DC du 17 mai 2013, du Conseil constitutionnel selon lequel l'autorité administrative doit vérifiér dans chaque cas, le respect de l'exigence de conformité du projet d'adoption à l'intérêt de l''enfant.
Dans un arrêt du 28 février 2018, la Première chambre a décidé que si l'adoption plénière d'un enfant, par une personne âgée de plus de vingt-huit ans, est autorisée par l'article 343-1 du code civil, elle a pour effet, aux termes de l'article 356 du même code, de conférer à cet enfant une filiation se substituant à sa filiation d'origine et de le priver de toute appartenance à sa famille par le sang. Seule l'adoption plénière de l'enfant du conjoint, permise par l'article 345-1, laissait subsister sa filiation d'origine à l'égard de ce conjoint et de sa famille. Elle a déclaré que le droit au respect de la vie privée et familiale garanti à l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'imposait pas de consacrer, par une adoption, tous les liens d'affection, fussent-ils anciens et établis. Le fait que la mère biologique et la candidate à l'adoption n'était pas mariées, entraînerait la fin du lien de filiation de l'enfant avec sa mère, qui n'y avait pas renoncé. On se trouverait alors dans une situation contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant, lequel résidait dans le maintien des liens avec sa mère biologique En rejettant la demande d'adoption pleinière par la concubine de la mère, la Cour d'appel avait légalement justifié sa décision. (Première Chambre 28 février 2018, pourvoi n°17-11069, Legifrance).
Mais, restent en vigueur, les effets, droits et obligations reconnus par les dispositions légales antérieures que la loi du 17 mai 2013 n'a pas expressément modifiées. Sous l'ancienne législation, un tribunal avait rejeté la requête aux fins d'adoption simple d'un majeur protégé en constatant que le médecin qui avait examiné la personne concernée avait estimé que l'adopté ne se trouvait pas en mesure de donner son consentement à sa propre adoption. Le tuteur avait demandé que soit désigné un administrateur ad hoc qui donnerait son consentement aux côtés de la personne adoptée. Pour rejeter cette requête, le tribunal avait considéré qu'aucun texte ne permettait au juge des tutelles de désigner un tiers pour suppléer à l'absence de consentement d'un majeur protégé à une demande d'adoption. La Cour de cassation a confirmé le refus en rappelant que "le consentement d'un majeur protégé à sa propre adoption qui est un acte strictement personnel ne peut être donné en ses lieu et place par son tuteur. Le juge des tutelles, sur avis du médecin traitant, peut autoriser le majeur protégé, seul ou avec l'assistance du tuteur ou de la personne qui en tient lieu, à consentir à sa propre adoption. Ayant relevé que le psychiatre, commis en qualité d'expert par le juge des tutelles, a constaté, dans son certificat médical du 18 octobre 2004, que A... . n'était pas en mesure d'organiser un raisonnement, un jugement ou d'exprimer une volonté élaborée et qu'elle ne pouvait consentir à l'adoption projetée, le tribunal de grande instance (actuellement le Tribunal judiciaire) en a déduit à bon droit que la maladie dont elle (la personne concernée par le projet d'adoption) souffrait ne permettait pas l'application des dispositions de l'article 501 du code civil" (1ère Chambre civile, 8 octobre 2008, BICC n°696 du 15 février 2009). Lorsque l'adoptant décède après avoir régulièrement recueilli l'enfant en vue de son adoption, la requête en adoption peut être présentée en son nom par le conjoint survivant ou l'un des héritiers. Le légataire universel n'étant pas un héritier, au sens de l'article 353, alinéa 3, du code civil, il n'a pas qualité pour présenter une requête en adoption (1ère Chambre civile, pourvoi n°09-10918, BICC n°726 du 15 juillet 2010 et Legifrance. Consulter la note de M. Chénédé référencée dans la Bibliographie ci-après et, 1ère Civ., 20 novembre 1990, pourvoi n° 89-14565, Bull. 1990, I, n° 254 (rejet) ; 1ère Civ., 13 mars 2007, pourvoi n° 04-13925, Bull. 2007, I, n° 108.
Compte tenu des effets que produit l'adoption plénière, quant au changement que subit état civil l'enfant adopté, et de ce que la substitution de filiation est irréversible, la loi a limité l'adoption plénière aux mineurs de quinze ans. La loi ne fait d'exception à cette règle, que dans le cas où l'enfant a été déclaré abandonné par ses parents biologiques et qu'il a été recueilli par les futurs adoptants avant l'âge limite ci-dessus. Pour déclarer un mineur abandonné le juge dispose d'un pouvoir souverain à condition de motiver suffisamment sa décision. A la date à laquelle il est amené à statuer, le juge du fond apprécie l'intérêt de l'enfant de maintenir la stabilité de son milieu familial. Il tient compte des délais entre la naissance, le consentement et le placement en vue d'adoption de telle sorte qu'ils aient été suffisants pour permettre aux parents de naissance d'agir. Sans méconnaître l'article 7 § 1 de la Convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant et l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le juge du fond a pu estimer que, passé un délai suffisant pour que les parents de naissance puissent manifester leur intérêt et souscrire une reconnaissance, il était contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant de le priver de l'environnement familial stable que peut lui conférer le placement en vue d'adoption dans l'attente d'une hypothétique reconnaissance, intervenue 17 mois après la naissance sans manifestation antérieure d'intérêt (1ère Chambre civile 1er juin 2011, pourvois n°10-20554 et n°10-19028, BICC n°750 du 15 novembre 2011 et Legifrance). . La Cour de cassation a approuvé une Cour d'appel qui a relevé que, si la mère, avait été hospitalisée à plusieurs reprises, elle avait cependant bénéficié de nombreux congés d'essai au cours desquels elle n'avait fait aucune tentative pour établir des relations avec l'enfant, soit par demande de visite, soit par appel téléphonique, soit par envoi de courriers ou colis et qu'il n'était pas démontré que ses troubles psychologiques l'empêchaient de chercher à établir avec sa fille des liens affectifs et aient été de nature à troubler son jugement et sa volonté dans ses décisions concernant le sort de sa fille. La mère de l'enfant ne rapportait pas non plus la preuve d'une grande détresse, de sorte que c'était à bon droit que le juge du fond avait décidé de déclarer abandonnée l'enfant et qu'il avait délégué l'autorité parentale sur cette enfant à l'aide sociale à l'enfance. (1ère Chambre civile 23 juin 2010, pourvoi n°09-15129, BICC n°731 du 15, novembre 2010 et Legifrance). A propos des arrêts cités ci-dessus, consulter les notes de Madame Élodie Pouliquen et de Madame Neirinck référencées dans la Bibliographie ci-après.
L'intégrité du consentement de l'adoptant, en tant que condition légale à l'adoption, est vérifiée au moment où le tribunal se prononce sur celle-ci, de sorte que la contestation ultérieure du consentement de l'adoptant, qui est indissociable du jugement d'adoption, ne peut se faire qu'au moyen d'une remise en cause directe de celui-ci par l'exercice des voies de recours et non à l'occasion d'une action en révocation de cette adoption, laquelle suppose que soit rapportée la preuve d'un motif grave, résidant dans une cause survenue postérieurement au jugement d'adoption. (Première Chambre civile 13 mai 2020, pourvoi n°19-13419, Legifrance)
La finalité de l'adoption réside dans la création d'un lien de filiation et son utilisation à des fins étrangères à celle-ci constitue un détournement de l'institution. Il en est ainsi lorsque le but poursuivi est de nature successorale et fiscale et que l'adoption a pour objet de réduire les droits des enfants de l'adoptant issus de son mariage, tout en faisant des adoptées ses héritières réservataires. L'adoption ayant été détournée de son but, le jugement d'adoption doit être rétracté. (1ère Chambre civile 13 juin 2019, pourvoi n° 18-19100, BICC n°912 du 1er décembre 2019 et Legifrance).
L'intérêt de l'enfant doit être pris en considération par le juge, même lorsque les conditions d'application de l'article 350 du code civil sont réunies. Si le juge du fond relève, d'une part, que, la déclaration judiciaire d'abandon ayant pour effet de rendre le mineur adoptable, il risquait d'être confronté à une séparation douloureuse avec sa famille d'accueil, à laquelle il était très attaché et chez laquelle il vivait depuis son plus jeune âge. D'autre part, l'article 377, alinéa 2, du code civil permettait à l'aide sociale à l'enfance de se faire déléguer en tout ou partie l'exercice de l'autorité parentale. C'était donc un cas où le juge du fond pouvait déduire de cette situation, que la déclaration judiciaire d'abandon sollicitée n'était pas conforme à l'intérêt de l'enfant (1ère Chambre civile 3 décembre 2014, pourvoi n°13-24268, Legifrance).
L'intérêt de l'enfant est retenu par la 1ère Chambre dans le cas où la demande d'adoption simple, intéresse la naissance d'un enfant né d'une convention de gestation pour autrui alors que la procréation pour le compte d'autrui est nulle d'une nullité d'ordre public. Elle juge que le recours à la gestation pour autrui à l'étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l'adoption de l'enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l'adoption sont réunies et si elle est conforme à l'intérêt de l'enfant. (1ère Chambre civile 5 juillet 2017, pourvoi n°16-16455, Legifrance).
Concernant le refus de transcription des actes de naissance des enfants conçus à l'étranger à la suite d'une convention de gestation pour autrui la jurisprudence de la Cour de cassation a évolué. Dans le dernier état des arrêts de la 1ère Chambre, la Cour de cassation a jugé que le refus de transcription ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale des enfants, au regard du but légitime poursuivi. L'accueil des enfants au sein du foyer constitué par leur père et son épouse n'est pas remis en cause par les autorités françaises, qui délivrent des certificats de nationalité française aux enfants nés d'une gestation pour autrui à l'étranger. Ensuite, en considération de l'intérêt supérieur des enfants déjà nés, le recours à la gestation pour autrui ne fait plus obstacle à la transcription d'un acte de naissance étranger, lorsque les conditions de l'article 47 du Code civil sont remplies, ni à l'établissement de la filiation paternelle. Enfin, l'adoption permet, si les conditions légales en sont réunies et si elle est conforme à l'intérêt de l'enfant, de créer un lien de filiation entre les enfants et l'épouse de leur père. (1ère Chambre civile 05 juillet 2017, pourvoi n°15-28597, Legifrance et Juricaf, et aussi même Chambre même date, pourvois n°16-16901, 16-16455, n°16-16495 tous publiés au bulletin et Legifrance).
Jusqu'à la loi n° 2002-93 du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'État, les personnes ayant fait l'objet d'une adoption plénière se trouvaient dans l'impossibilité de rechercher leurs origines. Cette loi modifie le Code de l'action sociale et des familles et crée un Conseil national pour l'accès aux origines personnelles qui reçoit la demande d'accès à la connaissance des origines de l'enfant. Le père ou la mère de naissance qui font une déclaration expresse de levée du secret ou les ascendants, descendants ou collatéraux privilégiés du père ou de la mère de naissance qui font une déclaration d'identité sont informés que cette déclaration ne sera communiquée à la personne concernée que si celle-ci fait elle-même une demande d'accès à ses origines. Le conseil communique à la ou aux personnes requérantes, après s'être assuré qu'elles maintiennent leur demande, l'identité de la mère de naissance. L'accès d'une personne à ses origines est sans effet sur l'état civil et la filiation. Il ne fait naître ni droit ni obligation au profit ou à la charge de qui que ce soit. Ces dispositions s'appliquent aux enfants nés à l'étranger.
L'adoption simple, maintien les liens familiaux entre l'adopté et ses parents biologiques. Cependant les parents biologiques sont sans qualités pour s'opposer à l'adoption simple de leur enfant devenu majeur lorsqu'il a régulièrement donné son accord à son adoption. (Cour de cassation 1ère Chambre civile 20 mars 2013, pourvoi n°12-16401, BICC n°786 du 15 juillet 2013 et Legifrance. Si les obligations des parents biologiques sont considérés comme étant subsidiaires, il reste cependant que cette subsidiarité n'est pas exclusive d'une contribution partielle. Ainsi, si le juge du fond constate la faiblesse des revenus du ou des adoptants il peut, après avoir apprécié la situation matérielle de chacune des parties en cause, décider à bon droit que la part des besoins de l'enfant non assumée par le ou les adoptants devait être mise à la charge des parents biologiques. Il en a été ainsi jugé dans le cas dans lequel l'enfant avait été adopté par le mari de la mère de l'enfant dont il était divorcé (1ère chambre civile, 14 avril 2010, pourvoi n°09-12456, BICC n°727 du 15 septembre 2010 et Legifrance). Consulter aussi la note de M. François Chénédé référencée dans la Bibliographie ci après;
Le lien que crée l'adoption entre l'adopté et l'adoptant est un lien personnel qui, en ce qui concerne l'adoption simple, ne se transmet pas aux héritiers des parties à l'adoption, de sorte que selon la Cour de cassation (Cass. 1ère CIV. - 6 décembre 2005. BICC n°636 du 15 mars 2006, N° 501), le droit de former un recours en révision n'est pas transmis, lors du décès de l'adopté, à son fils, alors que ni l'adoptant, ni l'adopté n'ont engagé, de leur vivant, d'action en révision du jugement de révocation, de sorte que l'héritier de l'adopté est irrecevable à l'exercer lorsque cette action n'a pas été engagée par l'adopté.
L'adoption simple s'est trouvée quelquefois détournée de son but. Ainsi, deux époux étant divorcés et l'ex- mari s'étant remarié avec une tierce personne, il a cependant engagé une procédure d'adoption simple en vue d'adopter son ex-épouse. La demande a été rejetée et la Première Chambre civile a approuvé l'arrêt de la Cour d'appel en énonçant que l'institution de l'adoption n'avait pas vocation à créer un lien de filiation entre deux ex-époux (1ère Chambre civile 23 juin 2010 pourvoi n°09-66782, BICC n°731 du 15 novembre 2010 et Legifrance). Consulter la note de M. François Chénedé référencée dans la Bibliographie ci-après. Des adoptions ont pu également être réalisées en vue de permettre à l'adopté de porter un nom prestigieux ou de se voir conférer un titre nobiliaire. On peut pareillement imaginer que l'adoption peut être utilisée pour bénéficier d'un avantage financier ou fiscal. Le Code de la nationalité française qui a prévu ce genre de détournement de la loi, précise que seule l'adoption plénière a un effet de droit sur la nationalité de l'adopté. Les juges des tribunaux sont chargés de veiller à ce que cette institution ne cache pas une déviance.
Concernant la convention qui prévoit l'accueil à son foyer d'un enfant conçu en exécution d'un contrat tendant à l'abandon à sa naissance par sa mère (dite mère porteuse) porte atteinte au principe d'ordre public de l'indisponibilité du corps humain et à celui de l'état des personnes et constitue un détournement de l'institution de l'adoption (Cass. ass. plén., 31 mai 1991, n° 90-20105 : Juris-Data n° 1991-001378 ; JCP G 1991, II, 21752, note F. Terré). Deux femmes vivant ensemble ayant eu chacune un enfant né par insémination artificielle du même donneur, ont formé chacune une demande d'adoption simple de l'enfant né de leur compagne avec ce donneur commun et chacune a consenti à l'adoption de leur enfant par l'autre. La Cour de cassation confirmant l'arrêt de rejet de la Cour d'appel qui était l'objet du pourvoi, a jugé que la mère de l'enfant perdrait son autorité parentale en cas d'adoption de son enfant alors qu'elle présente toute aptitude à exercer elle même cette autorité et ne manifeste aucun rejet à son égard. Elle juge que l'article 365 du code civil ne prévoit le partage de l'autorité parentale que dans le cas de l'adoption de l'enfant du conjoint de la mère, et qu'en l'état de la législation française, les conjoints sont des personnes unies par les liens du mariage. La Cour d'appel, qui avait rejeté la demande n'avait contredit aucune des dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme, et pris en considération l'intérêt supérieur des enfants, elle avait légalement justifié sa décision (1ère Chambre civile 9 mars 2011, pourvoi n°10-10385, LexisNexis, BICC n°745 du 1er juillet 2011 et Legifrance). Consulter la note de Claire Neirinck référencée dans la Bibliographie ci-après
Le Décret n° 2002-575 du 18 avril 2002 détermine les conditions que doivent réunir les personnes morales de droit privé pour être autorisées à servir d'intermédiaires en vue de l'adoption ou du placement en vue d'adoption de mineurs de quinze ans. Ces organismes doivent être en mesure de préparer le projet d'adoption et donner des conseils pour la constitution du dossier, informer les candidats sur les aspects techniques et juridiques de la procédure d'adoption, accompagner la famille après l'arrivée de l'enfant dans les conditions fixées à l'article L. 225-16 du code de l'action sociale et des familles. Et ce même s'il s'agit d'adoption de mineurs de nationalité étrangère.
Dans ce cas, ces organismes doivent pouvoir déterminer, en relation avec les autorités compétentes du pays d'origine, les modalités de choix d'une famille adoptive, d'acheminer les dossiers des candidats à l'adoption vers des personnes ou institutions compétentes pour prononcer l'adoption, et de conduire ou suivre la procédure prévue conformément au droit en vigueur.
Au plan du droit international privé, il convient de signaler l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Riom, (2e ch., du 15 mai 2001 ; M. c/ L. : Juris-Data n° 2001-142800) qui a ordonné l'exequatur en France d'un jugement roumain prononçant l'adoption de deux enfants par un couple français, Elle a estimé que la preuve d'une fraude à la loi commise par l'épouse au détriment de son mari n'étant pas rapportée puisque l'adoption a été prononcée à la requête des deux époux, le mari étant régulièrement représenté par sa femme, et les enfants ayant été accueillis et élevés par le couple à leur arrivée en France.
Toujours au plan du droit international, il a été rappelé que les actes établis par une autorité étrangère et destinés à être produits devant les juridictions françaises doivent au préalable, selon la coutume internationale et sauf convention internationale contraire, être légalisés pour recevoir effet en France (1re Civ. 28 novembre 2012, BICC n°778 du 15 mars 2013 et Legifrance). Ainsi, les actes constatant la réception par un juge d'un état étranger, du consentements des parents biologiques n'ayant fait l'objet d'aucune légalisation par les autorités locales compétentes, ces actes ne pouvaient être utilisés comme moyen de preuve régulier en France. Le juge français a donc légalement rejeté la requête des adoptants tendant à la conversion en adoption plénière des adoptions simples prononcées dans l'État où ils sont nés (1ère Chambre civile 23 mai 2012, deux arrêts - pourvois n°11-28645 et n°12-30090., BICC n°770 du 1er novembre 2012 et Legifrance). Consulter aussi la note de Madame Pascale Salvage-Gerest référencée dans la Bibliographie ci-après.
Une Loi n° 2005-744 du 4 juill. 2005 : JO n° 155, 5 juill. 2005 a crée une Agence française pour l'adoption, qui a pris la forme d'un groupement d'intérêt public constitué par l'État, les départements et des personnes morales de droit privé qui a «pour mission d'informer, de conseiller et de servir d'intermédiaire pour l'adoption de mineurs étrangers de quinze ans», est autorisée à intervenir comme intermédiaire pour l'adoption dans l'ensemble des départements. Cette Agence est également «habilitée à intervenir comme intermédiaire pour l'adoption dans les États parties à la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale».
De son côté, le nouvel article L. 225-16 du Code de l'action sociale et des familles dispose, que chaque président du conseil général doit désigner au sein de ses services au moins une personne chargée d'assurer les relations avec l'Agence française de l'adoption. Les critères de l'abandon des enfants délaissés par leurs parents sont assouplis, principalement en cas de "grande détresse des parents", circonstance qui auparavant empêchait le tribunal de grande instance (actuellement le Teribunal judiciaire) de déclarer que l'enfant se trouvait abandonné.
Par ailleurs, est institué un modèle type d'agrément, défini par décret qui prévoit en outre que «le mineur placé en vue d'adoption ou adopté bénéficie d'un accompagnement par le service de l'aide sociale à l'enfance ou l'organisme mentionné à l'article L. 225-11 [du Code de l'action sociale et des familles] à compter de son arrivée au foyer de l'adoptant et jusqu'au prononcé de l'adoption plénière en France ou jusqu'à la transcription du jugement étranger. Cet accompagnement est prolongé si l'adoptant le demande, notamment s'il s'y est engagé envers l'État d'origine de l'enfant. Dans ce dernier cas, il s'effectue selon les modalités de calendrier déterminées au moment de l'engagement».
Il convient de rappeler que la loi n° 2001-111 du 6 février 2001 a posé, dans le nouvel article 370-3 du code civil, une règle de conflit de lois en matière d'adoption d'enfant prononcée à l'étranger. Le juge doit rechercher si la loi personnelle de l'enfant étranger autorise son adoption. Si la loi personnelle de l'enfant prohibe l'adoption ou si les institutions étrangères et françaises ne peuvent être assimilées, alors aucune des formes d'adoption prévues par la Loi française ne se trouve applicable et même la demande d'adoption simple doit être rejetée (1ère Civ. - 10 octobre 2006. [deux arrêts], BICC n°654 du 1er février 2007). Le refus d'exequatur fondé sur la contrariété à l'ordre public international français de la décision étrangère suppose que celle-ci comporte des dispositions qui heurtent des principes essentiels du droit français. La Première Chambre de la Cour de cassation a jugé qu'il n'en est pas ainsi de la décision qui partage l'autorité parentale entre la mère et l'adoptante d'un enfant (1ère Chambre civile 8 juillet 2010, pourvoi n°08-21740, BICC n°732 du 1er décembre 2010 et Legifrance). Voir les notes de Madame Gallmeister et celle de M. Devers référencées dans la Bibliographie ci-après.
Le Décret n° 2009-407 du 14 avril 2009 relatif à l'Autorité centrale pour l'adoption internationale a modifié les articles R. 148-4 à R. 148-11 du Code de l'action sociale et des familles. Le service chargé de l'adoption internationale du ministère des affaires étrangères constitue l'Autorité centrale pour l'adoption internationale. Il veille au respect par la France de ses obligations au titre de la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. Sa mission est permanente : elle conduit des missions de coopération internationale, bilatérale ou multilatérale, en matière d'adoption ou de protection de l'enfance, elle exerce une mission permanente de veille, de régulation et d'orientation sur les questions de l'adoption internationale, notamment à la suspension ou la reprise des adoptions en fonction des circonstances et des garanties apportées par les procédures mises en oeuvre par les pays d'origine des enfants dans les conditions prévues au Code de l'action sociale, et à l'établissement des instructions particulières en matière de visas adressées aux chefs de mission diplomatique et aux chefs de poste consulaire pour la délivrance des visas relatifs aux procédures d'adoption internationale.
Concernant l'adoption en France d'enfants étrangers dont le statut personnel méconnaît l'adoption, la Première Chambre de la Cour d'appel de Versailles a jugé qu'aux termes du second alinéa de l'article 370-3 du Code civil "l'adoption d'un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France".
Relativement aux enfants nés en Algérie, la loi algérienne interdit l'adoption "Trabani", en revanche, elle admet le recueil légal dit "kafala", lequel s'apparente à un transfert d'autorité parentale et consiste dans l'engagement de prendre bénévolement en charge l'entretien, l'éducation et la protection d'un enfant mineur au même titre que le ferait un père pour son enfant. L'adoption, simple ou plénière, créant un lien de filiation entre l'adoptant et l'adopté, ne saurait donc être assimilée à l'institution de droit algérien du "kafala". La Cour de cassation juge à cet égard, que la règle de conflit de l'article 370-3, alinéa 2, du code civil renvoyant à la loi personnelle de l'adopté, constitue la traduction, en droit interne, des règles édictées par la convention de la Haye du 29 mai 1993 relative à la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, laquelle dispose, notamment dans son article 4 a), que l'adoption ne peut être prononcée que si l'enfant est adoptable. En rejetant la demande d'adoption les juges du fond n'avaient pas méconnu l'intérêt primordial de l'enfant, ni établi de différence de traitement au regard de sa vie familiale. L'article 46 du Code de la famille algérien interdit l'adoption, tandis que l'article 116 de ce même code définit la Kafala comme l'engagement bénévole de prendre en charge l'entretien, l'éducation et la protection de l'enfant comme le ferait un père pour son fils, la décision des juges du fond n'avait pas compromis son intégration dans une famille. C'était à juste titre qu'ils avaient rejeté la requête en adoption, dès lors que la kafala, expressément reconnue par l'article 20, alinéa 3, de la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, préserve l'intérêt supérieur de ce dernier. (Chambre civile 15 décembre 2010, pourvoi n°09-10439, BICC n°740 du 15 avril 2011 et Legifrance). Il faut noter que selon la Cour de cassation, même si son pays d'origine ne reconnaît pas le droit à l'adoption, en application de l'article 26-5 du Code civil, un enfant d'origine étrangère est adoptable en France lorsqu'il acquis la nationalité française. Ce droit lui est acquis dès la date de la souscription de la déclaration de nationalité dès lors qu'elle a été enregistrée. Cette règle ne peut toutefois intéresser que l'enfant qui n'a pas de filiation ou dont les deux parents sont décédés. L'enfant étant orphelin de ses deux parents, un conseil de famille est alors réuni qui peut décider de consentir à son adoption plénière (1ère Chambre civile 30 septembre 2003, pourvoi n°01-02630, Legifrance). Consulter aussi la note de Madame Gallois référencée dans la Bibliographie ci-après.
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Bibliographie
NOTE
Le rapport de M. Gouzes citée dans la bibliographie ci-dessus est mentionné sur le site de la Documentation française.