par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 6 décembre 2012, 11-26146
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
6 décembre 2012, 11-26.146

Cette décision est visée dans la définition :
Article 700 NCPC




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Com. 15 avril 2008, pourvoi n° 07-12. 590) que Jean X... s'est porté caution envers la société Banque Martin Maurel (la banque) des engagements de la société Servaux dont il était le dirigeant ; qu'il est décédé le 18 mai 1999 ; que la banque, ayant demandé aux consorts X... le paiement du solde débiteur de comptes, a été déboutée ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une certaine somme au titre des frais irrépétibles, alors, selon le moyen, que l'article 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, est contraire au respect des droits de la défense, tel qu'il est assuré par les dispositions constitutionnelles ; qu'il y a lieu, dès lors, de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; qu'à la suite de la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale au regard du principe constitutionnel susvisé ;

Mais attendu que par arrêt du 31 mai 2012 la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité posée ;

D'où il suit que le moyen est inopérant ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer 30 000 euros au titre des frais irrépétibles, alors, selon le moyen :

1°/ que la condamnation d'une partie aux frais irrépétibles a un caractère indemnitaire, de sorte qu'il ne doit en résulter pour son bénéficiaire aucun profit ; qu'en condamnant néanmoins la banque à 30 000 euros au titre des frais irrépétibles quand cette somme, par son importance, est nécessairement supérieure, eu égard à la nature du litige, au montant des frais réellement dépensés par les héritiers de Simone X..., la cour d'appel a violé les articles 700 du code de procédure civile et 1382 du code civil ;

2°/ que si le juge judiciaire doit se prononcer sur les frais irrépétibles au regard de l'équité, il n'en demeure pas moins qu'il a l'obligation de motiver sa décision sur ce point ; qu'en condamnant néanmoins la banque à 30 000 euros de dommages-intérêts au titre des frais irrépétibles par la seule référence à l'article 700 du code de procédure civile et sans aucune motivation, la cour d'appel a violé les articles 455 et 700 du code de procédure civile ;

3°/ qu'il résulte de la jurisprudence européenne que l'obligation de motivation des décisions de justice est inhérente au procès équitable ; qu'en condamnant néanmoins la banque à 30 000 euros au titre des frais irrépétibles sans motiver aucunement sa décision sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu que l'application de l'article 700 du code de procédure civile relève du pouvoir discrétionnaire du juge ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais, sur le premier moyen :

Vu les articles 625 du code de procédure civile et 1351 du code civil ;

Attendu que l'arrêt a condamné la banque à payer aux consorts X... la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour action et procédure abusives ;

Qu'en statuant ainsi alors que l'arrêt de cassation partielle du 15 avril 2008 laisse subsister le chef du dispositif de l'arrêt du 6 mars 2007 rejetant la demande indemnitaire pour procédure abusive, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la banque Martin Maurel à payer aux héritiers de Simone X... la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, l'arrêt rendu le 7 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée contre la banque ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six décembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Banque Martin Maurel.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la banque MARTIN MAUREL à payer aux héritiers de Simone X... la somme de 30 000 € à titre des dommages et intérêts pour action et procédure abusives ;

Aux motifs que, « il demeure que les obligations de la veuve et des héritiers de Jean X... étaient à l'évidence éteintes depuis la fin de l'année 1999 au moins, la banque, professionnelle du crédit, est inexcusable de les avoir assignés en mai 2000 et de les avoir contraints à suivre une longue procédure pendant plus de 10 ans ; que cet abus sera sanctionné par l'octroi d'une somme de 30 000 € à titre de dommages-intérêts » ;

Alors que, d'une part, la cassation ne replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé que sur les points qu'elle atteint ; que, dans son arrêt du 15 avril 2008, la Chambre commerciale avait cassé l'arrêt rendu le 7 décembre 2006 par la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE « seulement en ce qu'il a dit que la banque Martin Maurel est fondée à réclamer à Mme X. le montant des soldes débiteurs (…) » laissant ainsi intact et irrévocable le chef du dispositif par lequel les juges de second degré avaient débouté Madame X... de sa demande indemnitaire pour procédure abusive ; qu'en condamnant néanmoins la banque MARTIN MAUREL à 30 000 € pour action procédure abusive, la Cour de renvoi, qui a méconnu les limites de la cassation et l'étendue de sa saisine, a violé les articles 625 du Code de procédure civile et 1351 du Code civil ;

Alors que, d'autre part et subsidiairement, en condamnant la banque MAUREL à payer 30. 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive au motif inopérant qu'elle est inexcusable d'avoir assigné les défendeurs et de les avoir contraints à suivre une longue procédure, sans caractériser une faute de nature à faire dégénérer en abus l'exercice de son droit d'ester en justice, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Alors qu'en outre et subsidiairement, une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu'il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet en appel ou par une juridiction du second degré dont l'arrêt a été cassé ; qu'en condamnant néanmoins la banque MARTIN MAUREL pour résistance abusive, sans caractériser de circonstances particulières la justifiant et après avoir relevé que le jugement infirmé et l'arrêt cassé avaient accueilli sa demande, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Alors qu'enfin et subsidiairement, en condamnant la banque MARTIN MAUREL à payer 30. 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, sans caractériser l'existence d'un préjudice qui en serait résulté, la Cour d'appel d'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION TIRE D'UNE QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la banque MARTIN MAUREL à payer aux héritiers de Simone X... la somme de 30 000 € au titre des frais irrépétibles ;

Aucun motif ne vient au soutien de cette condamnation ;

Alors que, l'article 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, est contraire au respect des droits de la défense, tel qu'il est assuré par les dispositions constitutionnelles ; qu'il y a lieu, dès lors, de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; qu'à la suite de la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale au regard du principe constitutionnel susvisé.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la banque MARTIN MAUREL à payer aux héritiers de Simone X... la somme de 30 000 € au titre des frais irrépétibles ;

Aucun motif ne vient au soutien de cette condamnation ;

Alors que, d'une part, la condamnation d'une partie aux frais irrépétibles a un caractère indemnitaire, de sorte qu'il ne doit en résulter pour son bénéficiaire aucun profit ; qu'en condamnant néanmoins la banque MARTIN MAUREL à 30 000 € au titre des frais irrépétibles quand cette somme, par son importance, est nécessairement supérieure, eu égard à la nature du litige, au montant des frais réellement dépensés par les héritiers de Madame X..., la Cour d'appel a violé les articles 700 du Code de procédure civile et 1382 du Code civil ;

Alors que, d'autre part, si le juge judiciaire doit se prononcer sur les frais irrépétibles au regard de l'équité, il n'en demeure pas moins qu'il a l'obligation de motiver sa décision sur ce point ; qu'en condamnant néanmoins la banque MARTIN MAUREL à 30 000 € de dommages et intérêts au titre des frais irrépétibles par la seule référence à l'article 700 du Code de procédure civile et sans aucune motivation, la Cour d'appel a violé les articles 455 et 700 du Code de procédure civile ;

Alors qu'enfin, il résulte de la jurisprudence européenne que l'obligation de motivation des décisions de justice est inhérente au procès équitable ; qu'en condamnant néanmoins la banque MARTIN MAUREL à 30 000 € au titre des frais irrépétibles sans motiver aucunement sa décision sur ce point, la Cour d'appel a violé l'article 6. 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.



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Cette décision est visée dans la définition :
Article 700 NCPC


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.