par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 19 mai 2015, 13-26669
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Cour de cassation, chambre sociale
19 mai 2015, 13-26.669

Cette décision est visée dans la définition :
Plan de cession de l'entreprise




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Vu leur connexité, joint les pourvois n° H 13-26. 669, G 13-26. 670, J 13-26. 671, K 13-26. 672, M 13-26. 673, N 13-26. 674, P 13-26. 675, Q 13-26. 676 et R 13-26677 ;

Sur le premier moyen :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Dijon, 26 septembre 2013), que la Société générale des pierres et marbreries de Bourgogne (Sogepierre), a bénéficié d'une procédure de redressement judiciaire le 25 février 2009, la SCP X... étant désignée en qualité de mandataire judiciaire et M. Y... en qualité d'administrateur ; que le 15 décembre 2009, le tribunal de commerce a homologué le plan de cession de l'entreprise et autorisé le licenciement de dix-sept salariés pour motif économique ; que le 24 décembre 2009, la société Sogepierre a été placée en liquidation judiciaire et Mme X... désignée en qualité de liquidateur ; que M. Z... et huit autres salariés ont été licenciés pour motif économique le 4 janvier 2010 et qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de fixer la créance de dommages-intérêts des salariés au passif de la société pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il se déduit de l'article L. 1235-7 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, que toute contestation portant sur la validité ou la régularité d'un licenciement économique, dès lors que la contestation est susceptible d'entraîner la nullité de la procédure en raison de l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi, se prescrit par douze mois à compter de la notification de la lettre de licenciement ; qu'en faisant droit aux prétentions des salariés fondées sur l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi, tout en constatant que ces derniers avaient été licenciés par des lettres du 19 février 2010 lire 4 janvier et avaient attendu le 7 février 2012 pour saisir le conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°/ que l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi n'est exigé qu'à l'égard des entreprises comptant au moins cinquante salariés à la date de l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en retenant que la société Sogepierre devait élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi au motif qu'au jour de l'engagement de la procédure de licenciement, le 24 décembre 2009, elle était forte de soixante salariés, après avoir constaté que le jugement du tribunal de commerce, en date du 15 décembre 2009 avait arrêté un plan de cession de l'entreprise entraînant la reprise de quarante-trois salariés sur les soixante qui composaient la société, sans rechercher si, comme il était soutenu, ce jugement ne prenait pas effet dès son prononcé de sorte qu'à la date du 24 décembre 2009, l'effectif de la société était inférieur à cinquante salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-61 du code du travail et L. 631-19 du code de commerce ;

Mais attendu que lorsque dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, l'administrateur élabore un plan de cession de l'entreprise, il ne peut être arrêté qu'après la consultation des institutions représentatives du personnel dans les conditions prévues par l'article L. 1233-58 du code du travail dès lors qu'il prévoit des licenciements pour motif économique et que c'est à la date à laquelle est établi le projet de plan que doit s'apprécier l'effectif de l'entreprise ;

Et attendu ensuite, qu'ayant constaté que l'administrateur judiciaire avait consulté la délégation unique du personnel le 27 novembre 2009 sur un plan de cession qui envisageait des licenciements pour motif économique et qu'à cette date l'effectif de l'entreprise était supérieur à cinquante salariés, la cour d'appel a exactement décidé que les licenciements devaient être précédés d'un plan de sauvegarde de l'emploi et qu'en son absence ils étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que le moyen, nouveau en sa première branche, mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne Mme X..., ès qualités, aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X..., ès qualités, à payer la somme globale de 3 000 euros à MM. Z..., A..., C..., D..., E..., F..., G..., H... et Mme B... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille quinze.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens communs produits aux pourvois n° H 13-26. 669 à R 13-26. 677 par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils pour Mme X..., ès qualités,

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé au passif de la procédure collective de la société Sogepierre des créances de dommages-intérêts au profit des salariés pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une part, des créances de dommages-intérêts pour défaut de consultation du comité d'entreprise et absence d'information de l'inspecteur du travail sur le plan de sauvegarde de l'emploi, d'autre part,

AUX MOTIFS QUE (p. 2) par jugement du 25 février 2009, le tribunal de commerce de Dijon a placé la SA Sogepierre en redressement judiciaire ; que le 22 avril 2009, vingt-et-un salariés ont été licenciés pour motif économique après validation à la même date d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que le 27 novembre 2009, l'administrateur a consulté la délégation unique du personnel de la SA Sogepierre sur trois offres de reprise de l'entreprise entraînant de nouvelles suppression de poste ; que par jugement du 15 décembre 2009, le tribunal de commerce a homologué le plan de cession de l'entreprise, a autorisé le licenciement de dix-sept salariés et a chargé l'administrateur de procéder au licenciement collectif des salariés concernés ; que le 17 décembre 2009, Maître Y... es qualités a informé les salariés concernés et les a dispensés de se présenter au travail ; que le 24 décembre 2009, l'administrateur judiciaire a convoqué les salariés pour un entretien préalable au licenciement ; que par jugement du 2 février 2010, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la SA Sogepierre et désigné la SCP Véronique X... en qualité de liquidateur jugement ; que le 19 février 2010 lire 4 janvier, Maître Y... es qualité a licencié les salariés ; que le 7 février 2012, les salariés ont fait attraire la SCP Véronique X... ainsi que l'AGS et le CGEA devant le conseil de prud'hommes ; que (p. 4) en droit, l'article L. 1233-61 du code du travail dispose que, dans les entreprises de cinquante salariés et plus, lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre ; que de jurisprudence constante, l'effectif de l'entreprise rendant obligatoire l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi s'apprécie à la date de l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en fait, les documents régulièrement produits établissent que la procédure de licenciement a été engagée le 24 décembre 2009, date de la convocation des intéressés par l'administrateur judiciaire à l'entretien préalable au licenciement, et qu'à cette date, l'effectif de la SA Sogepierre était fort de 60 salariés, le jugement du tribunal de 5 sur 13 commerce en date du 15 décembre 2009 faisant mention de la reprise de 43 emplois par le cessionnaire et du licenciement collectif de 16 autres salariés (17 selon jugement rectificatif) ; que l'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi était par conséquent obligatoire ; que le défaut d'élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi prive de cause réelle et sérieuse les licenciements économiques prononcés ; que dès lors, il convient de confirmer, par substitution de motifs, le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

1°- ALORS QU ¿ il se déduit de l'article L. 1235-7 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, que toute contestation portant sur la validité ou la régularité d'un licenciement économique, dès lors que la contestation est susceptible d'entraîner la nullité de la procédure en raison de l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi, se prescrit par douze mois à compter de la notification de la lettre de licenciement ; qu'en faisant droit aux prétentions des salariés fondées sur l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi, tout en constatant que ces derniers avaient été licenciés par des lettres du 19 février 2010 lire 4 janvier et avaient attendu le 7 février 2012 pour saisir le conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°- ALORS QUE l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi n'est exigé qu'à l'égard des entreprises comptant au moins cinquante salariés à la date de l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en retenant que la société Sogepierre devait élaborer un plan de sauvegarde de l'emploi au motif qu'au jour de l'engagement de la procédure de licenciement, le 24 décembre 2009, elle était forte de 60 salariés, après avoir constaté que le jugement du tribunal de commerce en date du 15 décembre 2009 avait arrêté un plan de cession de l'entreprise entraînant la reprise de 43 salariés sur les 60 qui composaient la société, sans rechercher si, comme il était soutenu, ce jugement ne prenait pas effet dès son prononcé de sorte qu'à la date du décembre 2009, l'effectif de la société était inférieur à cinquante salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-61 du code du travail et L. 631-19 du code de commerce.

ET AUX MOTIFS, à les supposer adoptés, QUE l'employeur, doit satisfaire à son obligation de reclassement ; qu'en l'espèce, aucune recherche de reclassement n'est justifiée avant le licenciement ;

3° ALORS QUE le liquidateur faisait valoir que toutes les sociétés du groupe auquel appartenait la société Sogepierre étaient en procédure collective, que la société holding belge n'avait aucun emploi de production et qu'il avait été recherché des solutions de reclassement en dehors du groupe, ce dont justifiaient les pièces qu'il versait aux débats ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions et d'examiner ces pièces, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé au passif de la procédure collective de la société Sogepierre des créances de dommages-intérêts au profit des salariés pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une part, des créances de dommages-intérêts pour défaut de consultation du comité d'entreprise et absence d'information de l'inspecteur du travail sur le plan de sauvegarde de l'emploi, d'autre part,

AUX MOTIFS QUE (p. 2) le 27 novembre 2009, l'administrateur a consulté la délégation unique du personnel de la SA Sogepierre sur trois offres de reprise de l'entreprise entraînant de nouvelles suppression de poste ; que l'employeur, dont l'effectif était supérieur à cinquante salariés, était tenu d'établir et mettre en oeuvre un nouveau plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'en outre, selon l'article L. 1233-58 du code du travail, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur, selon le cas, qui envisage des licenciements économiques, réunit et consulte le comité d'entreprise ou, à défaut, les 11 sur 13 délégués du personnel dans les conditions prévues à l'article L. 2323-15 ainsi qu'aux articles L. 1233-30, premier, deuxième et huitième alinéas, pour un licenciement de dix salariés ou plus dans une entreprise de cinquante salariés et plus, L. 1233-31 à L. 1233-33, L. 1233-48 et L. 1233-63, relatifs à la nature des renseignements et au contenu des mesures sociales adressés aux représentants du personnel et à l'autorité administrative et L. 1233-49, L. 1233-61 et L. 1233-62, relatifs au plan de sauvegarde de l'emploi ; que la délégation unique du personnel n'a pas été consultée sur ce point, pas plus que l'inspecteur du travail n'en a été informé ;

1°- ALORS QUE les salariés admettaient eux-mêmes que la délégation unique du personnel avait été consultée, prétendant seulement qu'il aurait fallu consulter un comité d'entreprise en réalité inexistant ; qu'en retenant que la procédure avait été irrégulière dès lors que la délégation unique du personnel n'avait pas été consultée, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;


2°- ALORS en toute hypothèse QUE dans les entreprises comptant plus de dix salariés, les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne se cumulent pas avec les indemnités pour inobservation de la procédure ; qu'en allouant aux salariés une indemnité pour inobservation de la procédure s'ajoutant à l'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-2 du code du travail.



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Cette décision est visée dans la définition :
Plan de cession de l'entreprise


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.