par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. civ. 2, 11 mai 2017, 16-11444
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Cour de cassation, 2ème chambre civile
11 mai 2017, 16-11.444

Cette décision est visée dans la définition :
Matière Gracieuse




LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 26 novembre 2015), qu'un juge du livre foncier, saisi par la commune de Diebling (la commune) à fin d'inscription au livre foncier de parcelles vacantes et sans maître, a rejeté par une première ordonnance du 16 janvier 2014 la requête en ce qu'elle portait sur les parcelles dont la propriété était revendiquée par leurs exploitants respectifs ; que par une seconde ordonnance du 30 janvier 2014, le juge du livre foncier a rejeté une nouvelle requête, limitée à la parcelle cadastrée section 7 n° 92 revendiquée par M. X..., et invité la commune à se pourvoir devant le juge du fond ; que celle-ci ayant formé un pourvoi immédiat, le juge du livre foncier a maintenu sa décision et transmis le dossier à la cour d'appel ;

Attendu que la commune fait grief à l'arrêt de déclarer la requête en date du 27 janvier 2014 de la commune tendant à la modification de la décision prononcée par le juge du livre foncier du tribunal d'instance de Sarreguemines le 16 janvier 2014 irrecevable alors, selon le moyen :

1°/ que lorsqu'une juridiction statue en matière gracieuse, et qu'il lui est demandé de modifier sa précédente décision, la requête présentée en ce sens n'est pas irrecevable au seul motif qu'elle ne contient aucun élément nouveau ; qu'en déclarant dès lors irrecevable la requête de la commune, au seul motif que celle-ci « ne faisait valoir à l'appui de sa requête du 27 janvier 2014 aucun nouvel élément modifiant les circonstances dans lesquelles l'ordonnance du 16 janvier 2014 avait été prise », la cour d'appel a violé les articles 38, 40, 41 et 46 de la loi du 1er juin 1924 ;

2°/ qu'en matière gracieuse, le juge peut fonder sa décision sur tous les faits relatifs au cas qui lui est soumis, y compris ceux qui n'auraient pas été allégués ; qu'en déclarant dès lors irrecevable la requête de la commune, au seul motif que celle-ci « ne faisait valoir à l'appui de sa requête du 27 janvier 2014 aucun nouvel élément modifiant les circonstances dans lesquelles l'ordonnance du 16 janvier 2014 avait été prise » sans rechercher si, au vu du dossier qui lui était soumis, des faits nouveaux étaient intervenus depuis l'ordonnance du 16 janvier 2014, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 46 de la loi du 1er juin 1924 et de l'article 26 du code de procédure civile ;

3°/ que dans ses écritures en date du 21 mai 2015, la commune faisait valoir qu'elle avait interrogé les héritiers Y..., venant aux droits de M. Joseph Y... décédé le 9 novembre 1947, dernier propriétaire connu de la parcelle litigieuse, et que cette initiative était restée sans réponse à l'exception de Mme Raymonde Z..., « qui s'était présentée en mairie pour obtenir des renseignements sur la parcelle 7/92 et qui n'a plus donné suite » ; qu'en s'abstenant de rechercher si cette information donnée par la commune, qui établissait que la parcelle cadastrée section 7 n° 92 était définitivement abandonnée, ne constituait pas un élément nouveau susceptible de modifier le sens de la précédente décision du juge du livre foncier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 38, 40, 41 et 46 de la loi du 1er juin 1924 ;

Mais attendu que les décisions rendues en matière gracieuse ne sont susceptibles d'être rapportées ou modifiées que si les circonstances dans lesquelles elles ont été prononcées ont elles-mêmes changé ;

Et attendu qu'ayant relevé que la commune ne faisait valoir à l'appui de sa requête du 27 janvier 2014 aucun nouvel élément modifiant les circonstances dans lesquelles l'ordonnance du 16 janvier 2014 avait été prise, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches qui ne lui étaient pas demandées, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la commune de Diebling aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la commune de Diebling, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;



Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la commune de Diebling

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la requête en date du 27 janvier 2014 de la commune de Diebling tendant à la modification de la décision prononcée par le juge du livre foncier du tribunal d'instance de Sarreguemines le 16 janvier 2014 irrecevable ;

AUX MOTIFS QUE le juge du livre foncier du tribunal d'instance de Sarreguemines a statué par ordonnance du 16 janvier 2014 sur la requête de la commune de Diebling en date du 22 novembre 2012 tendant à voir inscrire à son nom au livre foncier notamment la parcelle section 7 n° 92 ; qu'aucune voie de recours n'a été exercée à l'encontre de cette décision, étant observé que la notification de cette ordonnance n'est pas produite au dossier, de sorte que le délai de quinze jours ouvert pour l'exercice du pourvoi immédiat n'a pas commencé à courir et qu'un pourvoi immédiat formé à son encontre demeure recevable ; que la requête déposée par la même commune de Diebling le 27 janvier 2014 demandait au magistrat de « modifier si possible sa décision pour cette seule parcelle section 7 n° 92 en l'attribuant à la commune, sachant que (nous) ne contestons pas (sa) décision pour les autres parcelles revendiquées par les exploitants et qui au final ne présentent pas d'intérêt pour la collectivité » au motif que son objectif est de lui permettre l'extension du lotissement communal ; qu'en application de l'article 46 de la loi du 1er juin 1924, le juge du livre foncier statue selon les règles propres à la matière gracieuse ; que dès lors, ses décisions sont dépourvues de l'autorité de la chose jugée et restent susceptibles d'être rapportées ou modifiées si les circonstances dans lesquelles elles sont été rendues ont elles-mêmes changé ; qu'une nouvelle demande peut en effet être admise à condition qu'elle s'appuie sur des arguments ou des faits nouveaux ; qu'en l'espèce, la commune de Diebling ne faisait valoir à l'appui de sa requête du 27 janvier 2014, aucun nouvel élément modifiant les circonstances dans lesquelles l'ordonnance du 16 janvier 2014 avait été prise ; qu'elle ne peut dès lors qu'être déclarée irrecevable ;

ALORS, D'UNE PART, QUE lorsqu'une juridiction statue en matière gracieuse, et qu'il lui est demandé de modifier sa précédente décision, la requête présentée en ce sens n'est pas irrecevable au seul motif qu'elle ne contient aucun élément nouveau ; qu'en déclarant dès lors irrecevable la requête de la commune de Diebling, au seul motif que celle-ci « ne faisait valoir à l'appui de sa requête du 27 janvier 2014 aucun nouvel élément modifiant les circonstances dans lesquelles l'ordonnance du 16 janvier 2014 avait été prise » (arrêt attaqué, p. 4, avant dernier alinéa), la cour d'appel a violé les articles 38, 40, 41 et 46 de la loi du 1er juin 1924 ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU' en matière gracieuse, le juge peut fonder sa décision sur tous les faits relatifs au cas qui lui est soumis, y compris ceux qui n'auraient pas été allégués ; qu'en déclarant dès lors irrecevable la requête de la commune de Diebling, au seul motif que celle-ci « ne faisait valoir à l'appui de sa requête du 27 janvier 2014 aucun nouvel élément modifiant les circonstances dans lesquelles l'ordonnance du 16 janvier 2014 avait été prise » (arrêt attaqué, p. 4, avant dernier alinéa), sans rechercher si, au vu du dossier qui lui était soumis, des faits nouveaux étaient intervenus depuis l'ordonnance du 16 janvier 2014, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 46 de la loi du 1er juin 1924 et de l'article 26 du code de procédure civile ;


ALORS, ENFIN, QUE dans ses écritures en date du 21 mai 2015 (p. 2, alinéa 3), la commune de Diebling faisait valoir qu'elle avait interrogé les héritiers Y..., venant aux droits de M. Joseph Y... décédé le 9 novembre 1947, dernier propriétaire connu de la parcelle litigieuse, et que cette initiative était restée sans réponse à l'exception de Mme Raymonde Z..., « qui s'était présentée en mairie pour obtenir des renseignements sur la parcelle 7/92 et qui n'a plus donné suite » ; qu'en s'abstenant de rechercher si cette information donnée par la commune, qui établissait que la parcelle cadastrée section 7 n° 92 était définitivement abandonnée, ne constituait pas un élément nouveau susceptible de modifier le sens de la précédente décision du juge du livre foncier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 38, 40, 41 et 46 de la loi du 1er juin 1924.



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Matière Gracieuse


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.