par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 30 septembre 2009, 08-13220
Dictionnaire Juridique
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
30 septembre 2009, 08-13.220
Cette décision est visée dans la définition :
Bien Propre
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 8 décembre 1978 sous le régime de la séparation de biens ; que, par un arrêt du 23 novembre 2004, statuant sur les mesures provisoires ordonnées par une ordonnance de non conciliation, la jouissance du domicile conjugal, bien propre du mari, a été attribuée à l'épouse à titre gratuit en complément d'une pension alimentaire versée au titre du devoir de secours ; que M. X... a assigné sa femme sur le fondement de l'article 217 du code civil aux fins d'être autorisé à procéder à la vente du domicile conjugal sans son consentement ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Metz, 9 janvier 2008) d'avoir autorisé son mari à procéder à la vente de la maison d'habitation constituant le domicile conjugal sans son consentement, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en ne répondant pas aux conclusions récapitulatives d'appel de Mme X... du 13 juin 2007 faisant valoir que M. X... tentait par la présente instance de remettre en cause les mesures provisoires prononcées par le juge aux affaires familiales qui avaient vocation à s'appliquer jusqu'au jour où le divorce deviendrait définitif, et, ce, en reprenant les mêmes arguments que ceux développés lors de la procédure d'appel de l'ordonnance de non conciliation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en tout état de cause, une décision du juge aux affaires familiales passée en force de chose jugée, statuant sur l'attribution du domicile conjugal à l'un des époux jusqu'au prononcé définitif du divorce, a autorité de la chose jugée en ce qui concerne cette attribution tant que la procédure de divorce est en cours ; qu'un arrêt du 23 novembre 2004, passé en force de chose jugée, statuant sur appel d'une ordonnance de non conciliation du juge aux affaires familiales, avait attribué à Mme X... la jouissance à titre gratuit de ce domicile conjugal ; qu'en écartant la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 23 novembre 2004 soulevée par l'exposante et en faisant droit à la nouvelle demande de M. X... de pouvoir disposer du domicile conjugal, à une date où la procédure de divorce était toujours en cours et où la décision du juge conciliateur continuait de produire ses effets, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil, ensemble l'article 482 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'attribution, à titre provisoire, de la jouissance du domicile conjugal à l'un des époux par le juge du divorce ne fait pas obstacle à une autorisation judiciaire de vente du logement familial à la demande de l'autre époux en application de l'article 217 du code civil ; que par ce motif de pur droit, substitué, dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile, à celui critiqué, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux dernières branches :
Attendu que Mme Y... fait le même grief à l'arrêt attaqué, alors, selon le moyen :
3°/ qu'en cas de survenance d'un fait nouveau au cours de la procédure de divorce, il est du pouvoir du juge aux affaires familiales et de lui seul de supprimer, modifier ou compléter les mesures provisoires qu'il a prescrites ; que le tribunal de grande instance et la cour d'appel de Metz ne pouvaient en conséquence statuer sur la demande de M. X... tendant, en définitive, à obtenir modification de la mesure prononcée par le juge aux affaires familiales relative à l'attribution à son épouse de la jouissance à titre gratuit du domicile conjugal ; qu'en statuant néanmoins sur cette demande, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, violant ainsi l'article 1118 du code de procédure civile ;
4°/ subsidiairement, que ce n'est qu'en cas de survenance d'un fait nouveau que les mesures provisoires prescrites par le juge aux affaires familiales peuvent être modifiées ou complétées ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle le devait et qu'il lui était au demeurant demandé, si la demande de M. X..., présentée au cours de la procédure de divorce et visant en définitive à obtenir modification de la mesure prononcée par le juge aux affaires familiales relative à l'attribution à son épouse de la jouissance à titre gratuit du domicile conjugal, était fondée sur la survenance de faits nouveaux depuis l'arrêt du 23 novembre 2004, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1118 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir procédé à une appréciation d'ensemble de l'intérêt familial et constaté d'abord que le budget mensuel de M. X..., seul à exercer une activité professionnelle rémunérée, présentait un déficit mensuel d'un certain montant, de nature à altérer sérieusement le budget familial, puis que ce dernier avait d'ores et déjà engagé des opérations de cession de ses avoirs propres pour assurer le paiement de dettes, la cour d'appel, statuant sur sa demande d'être autorisé à effectuer seul un acte de disposition sur le domicile conjugal, a souverainement déduit des éléments produits, que la vente projetée en vue de ne pas aggraver un déficit et de parvenir à une gestion de trésorerie plus saine, apparaissait conforme à l'intérêt de la famille ; que par ces motifs non critiqués, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme Y...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR autorisé Monsieur Bertrand X... à procéder à la vente de la maison d'habitation faisant office de domicile conjugal, sis ... (Moselle)
sans le consentement de Madame Aline Y... épouse X... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article 217 du code civil "un époux peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de son conjoint serait nécessaire, si celui-ci est hors d'état de manifester sa volonté ou si son refus n'est pas justifié par l'intérêt de la famille" ; qu'en l'espèce, la demande de Monsieur X... sur ce fondement est justifiée par les termes de l'article 215 alinéa 3 du même code qui précisent que "les époux ne peuvent l'un sans l'autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni les meubles meublants dont il est garni (...)" ; qu'en effet selon arrêt infirmatif du 23 novembre 2004, la cour d'appel de Metz a attribué à Madame X... le domicile conjugal à titre gratuit, en complément du devoir de secours pécuniaire de 1500 euros par mois ; que le premier juge avait attribué à Monsieur Bertrand X... le domicile conjugal, s'agissant d'un bien propre, son épouse étant autorisée à s'y maintenir jusqu'à sa vente ; que les dispositions de l'article 215 sus cité, ne reçoivent application que précédemment à la dissolution du lien matrimonial ; que la notion "d'intérêt de la famille" au sens de l'article susvisé, s'entend à la fois de ses intérêts patrimoniaux et non patrimoniaux ; qu'il est constant qu'en période de crise, s'agissant d'une instance en divorce en l'espèce, le choix s'impose entre divers intérêts individuels, l'intérêt légitime d'un membre de la famille pouvant ainsi constituer l'intérêt de la famille ;qu'en outre, l'intérêt de la famille doit s'apprécier au regard de l'endettement important des époux et peut recouvrir l'intérêt des créanciers lorsqu'il s'agit de travailler à la diminution du passif conjugal ; que Monsieur Bertrand X... prétend que la seule solution pour résoudre son endettement important, dont le montant n'est pas détaillé, « et mettre un terme rapidement aux besoins urgents de trésorerie, (c')est la vente de la résidence principale qui peut être estimée à 610000.00 euros" et produit une attestation de la société d'expertise comptable A.C.M.F. du 6 janvier 2004 en ce sens ; qu'il échet de constater, que Monsieur Bertrand X... a tenté depuis l'instauration de la procédure de divorce, d'assumer les dettes du couple et les dettes fiscales et professionnelles, soit en créant de la trésorerie par la vente de biens professionnels ou la création d'une SELARL, soit par la souscription de nouveaux crédits qui obèrent la viabilité de son budget; que la seule exception a été faite pour l'acquisition de son domicile ; que sa situation est de nature à sérieusement altérer le budget familial, dès lors que Monsieur X... est le seul à percevoir des revenus et à exercer une activité professionnelle rémunérée ; que l'immeuble occupé par Madame X... est un bien propre de son époux d'une valeur estimée de l'ordre de 600.000 euros ; qu'ainsi, il y a lieu de considérer au vu des éléments sus énoncés, que la demande de Monsieur X... formée au visa de l'article 217 du code civil, est conforme à l'intérêt de la famille ; que la volonté de Monsieur X... de ne pas aggraver son déficit et de retrouver une gestion de trésorerie plus saine est conforme à cette notion ; qu'enfin, il y a lieu de rappeler que Madame X... n'est aucunement fondée à s'opposer à cet acte de disposition d'un bien qui ne lui appartient pas, mais qu'elle occupe en vertu d'une décision de justice ; qu'enfin, Madame X... n'a plus d'enfant mineur à charge et si elle fait état de l'hébergement de deux de ses enfants majeurs, aucune circonstance de fait ne vient s'opposer à ce que, pour cette raison, la demande de Monsieur X... soit écartée ; qu'en conséquence il y sera fait droit, le jugement déféré étant infirmé à cet égard ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE selon l'article 482 du code de procédure civile, les décisions qui se bornent à ordonner une mesure provisoire n'ont pas au principal l'autorité de la chose jugée ; que tel est le cas des mesures provisoires ordonnées par le juge aux affaires familiales dans le cadre de l'ordonnance de non-conciliation ou par la cour d'appel en cas de recours (article 254 du code civil) ; que dès lors, l'exception d'irrecevabilité soulevée sera rejetée ;
1°) ALORS QU' en ne répondant pas aux conclusions récapitulatives d'appel de Madame X... du 13 juin 2007 faisant valoir que Monsieur X... tentait par la présente instance de remettre en cause les mesures provisoires prononcées par le juge aux affaires familiales qui avaient vocation à s'appliquer jusqu'au jour où le divorce deviendrait définitif, et, ce, en reprenant les mêmes arguments que ceux développés lors de la procédure d'appel de l'ordonnance de non conciliation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU' en tout état de cause, une décision du juge aux affaires familiales passée en force de chose jugée, statuant sur l'attribution du domicile conjugal à l'un des époux jusqu'au prononcé définitif du divorce, a autorité de la chose jugée en ce qui concerne cette attribution tant que la procédure de divorce est en cours ; qu'un arrêt du 23 novembre 2004, passé en force de chose jugée, statuant sur appel d'une ordonnance de non conciliation du juge aux affaires familiales, avait attribué à Madame X... la jouissance à titre gratuit de ce domicile conjugal ; qu'en écartant la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 23 novembre 2004 soulevée par l'exposante et en faisant droit à la nouvelle demande de Monsieur X... de pouvoir disposer du domicile conjugal, à une date où la procédure de divorce était toujours en cours et où la décision du juge conciliateur continuait de produire ses effets, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil, ensemble l'article 482 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU' en cas de survenance d'un fait nouveau au cours de la procédure de divorce, il est du pouvoir du juge aux affaires familiales et de lui seul de supprimer, modifier ou compléter les mesures provisoires qu'il a prescrites ; que le tribunal de grande instance et la cour d'appel de Metz ne pouvaient en conséquence statuer sur la demande de Monsieur X... tendant, en définitive, à obtenir modification de la mesure prononcée par le juge aux affaires familiales relative à l'attribution à son épouse de la jouissance à titre gratuit du domicile conjugal ; qu'en statuant néanmoins sur cette demande, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs, violant ainsi l'article 1118 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE , subsidiairement, ce n'est qu'en cas de survenance d'un fait nouveau que les mesures provisoires prescrites par le juge aux affaires familiales peuvent être modifiées ou complétées ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle le devait et qu'il il lui était au demeurant demandé, si la demande de Monsieur X..., présentée au cours de la procédure de divorce et visant en définitive à obtenir modification de la mesure prononcée par le juge aux affaires familiales relative à l'attribution à son épouse de la jouissance à titre gratuit du domicile conjugal, était fondée sur la survenance de faits nouveaux depuis l'arrêt du 23 novembre 2004, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1118 du code de procédure civile.
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Bien Propre
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 10/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.