par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. com., 28 juin 2016, 14-21810
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Cour de cassation, chambre commerciale
28 juin 2016, 14-21.810
Cette décision est visée dans la définition :
Caution / Cautionnement
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 juin 2014), que la société Interfimo s'est rendue caution d'un prêt consenti à M. X... par la société Le Crédit lyonnais (la banque) ; qu'en raison de la défaillance du débiteur principal, la société Interfimo a payé la banque, qui lui a délivré, le 14 mars 2001, une quittance subrogative ; qu'un jugement du 5 juillet 2005, devenu irrévocable, a condamné M. X... à payer à la société Interfimo la somme en principal de 259 585,20 euros ; que M. X... a été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 24 septembre 2009 et 23 février 2012 ; que la créance de la société Interfimo a été admise au passif ; qu'après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, le 14 septembre 2012, la société Interfimo a poursuivi M. X... ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de constater que la société Interfimo remplissait les conditions prévues à l'article L.643-11 alors, selon le moyen, que le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur ; que si la caution ou le coobligé qui a payé aux lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci après le jugement de clôture, elle ne recouvre pas le droit de reprendre des poursuites contre le débiteur lorsqu'elle a payé et obtenu, avant l'ouverture de la procédure collective, un titre exécutoire à son encontre ; qu'en statuant en sens contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 643-11 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article R. 643-20 du même code ;
Mais attendu qu'ayant exactement énoncé que l'article L.643-11, II du code de commerce, qui autorise la caution qui a payé à la place du débiteur principal à le poursuivre, malgré la clôture de la liquidation judiciaire de celui-ci pour insuffisance d'actif, ne distingue pas selon que ce paiement est antérieur ou postérieur à l'ouverture de la procédure collective, ni suivant la nature, subrogatoire ou personnelle, du recours exercé par la caution, la cour d'appel en a déduit à bon droit que la société Interfimo remplissait les conditions prévues par ce texte ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Yves Coudray-Christophe Ancel
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir constaté que la société INTERFIMO remplit les conditions prévues à l'article L. 643-11 du code de commerce et qu'elle recouvre contre Monsieur Pierre X... son droit de poursuite individuelle ;
Aux motifs que « Monsieur Pierre X... fait valoir qu'il convient en l'espèce d'appliquer l'article L.643-11, I du code de commerce qui ne permet pas la reprise des poursuites individuelles des créanciers suite à la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actif,
Il soutient en premier lieu que la société Interfimo, en procédant au paiement, a perdu sa qualité de caution depuis 2001 en application des articles 2311 et 1234 du code civil. Elle est devenue créancière personnelle de Monsieur X.... La créance dont elle se prévaut n'a pas pour fondement son engagement de caution, ni même la quittance subrogative du Crédit Lyonnais mais le jugement exécutoire du 5 juillet 2005.
Il soutient en second lieu qu'Interfimo ne peut se prévaloir de l'article L643-11, II du code de commerce applicable aux seules cautions privées du droit d'agir et que cette disposition ne peut en revanche s'appliquer à la caution qui a réglé et obtenu un jugement exécutoire antérieurement et qui a déclaré sa créance, provoquant la procédure collective. Cette caution n'en est plus une : elle est devenue un créancier chirographaire classique, qui a bénéficié de tous ses droits d'action, jouissant de toutes les garanties de l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Un tel créancier, parfaitement subrogé dans les droits et actions d'un créancier ordinaire, et devenu à son tour créancier ordinaire, doit donc se voir soumis à la règle de principe de l'article L.643-11, I du Code de commerce, qui interdit tout recours contre le débiteur liquidé pour insuffisance d'actif. La faculté de poursuivre le débiteur ne peut être accordée, selon lui, qu'à la caution qui n'a pas eu la faculté d'obtenir un titre exécutoire contre le débiteur avant l'ouverture d'une procédure collective.
La société Interfimo soutient qu'elle démontre sa qualité de caution, son règlement opéré en cette qualité, et l'admission définitive de sa créance et qu'elle est ainsi fondée à reprendre les poursuites à l'encontre de Monsieur X... après le jugement de clôture de la liquidation judiciaire de celui-ci.
Aux termes des dispositions de l'article L643-11 du code de commerce "Le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur, sauf si la créance résulte :
II - Toutefois la caution ou le coobligé qui a payé au lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci.
La cour constate que les dispositions de cet article ne distinguent pas selon que la caution a payé à la place du débiteur principal avant l'ouverture de la procédure ou postérieurement ni selon que le recours de la caution soit un recours personnel ou subrogatoire.
Il est en effet admis que la caution qui a dû payer à la place du débiteur principal est dans une situation différente de celle des autres créanciers, peu important à cet égard que la caution dispose déjà d'un titre exécutoire. Le caractère accessoire de la caution, qui a dû payer à la place du débiteur principal la met dans une situation différente des autres créanciers et lui permet d'exercer un recours dont les autres ne disposent pas. Le fait d'avoir obtenu un titre exécutoire ne lui fait pas perdre sa qualité.
Il convient de noter à cet égard que l'article L643-11 V du code de commerce mentionne expressément la nécessité d'obtenir une ordonnance du président du tribunal quand bien même un titre exécutoire aurait déjà été délivré, l'existence d'un titre exécutoire ne faisant donc pas obstacle à la reprise des poursuites individuelles. Il est à noter au surplus qu'en vertu de l'arrêt des poursuites individuelles, ce titre exécutoire ne pouvait être délivré qu'antérieurement à l'ouverture de la procédure.
Ainsi, les créanciers qui recouvrent leur droit de poursuite individuelle et dont les créances ont été admises ne peuvent exercer ce droit sans avoir obtenu un titre exécutoire ou, lorsqu'ils disposent déjà d'un tel titre, sans avoir fait constater qu'ils remplissent les conditions prévues à l'article L. 643-11 du code de commerce.
En l'espèce, la société Interfimo remplit les conditions nécessaires à la reprise des poursuites individuelles, elle a payé la dette cautionnée de Monsieur X... à la banque, elle a déclaré sa créance au passif de la procédure et elle y a été admise. N'ayant pas été remboursée par Monsieur X..., le débiteur principal c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à sa demande.
La société Interfimo demande à la cour de statuer sur le montant de la créance qu'elle est autorisée à recouvrir.
La cour relève que la société Interfimo dispose déjà d'un titre exécutoire puisqu'un jugement a été rendu en sa faveur le 5 juillet 2005 et que sa créance a été admise par ordonnance du juge commissaire au passif de la procédure de Monsieur X... » ;
Alors que le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur ; que si la caution ou le coobligé qui a payé aux lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci après le jugement de clôture, elle ne recouvre pas le droit de reprendre des poursuites contre le débiteur lorsqu'elle a payé et obtenu, avant l'ouverture de la procédure collective, un titre exécutoire à son encontre ; qu'en statuant en sens contraire, la Cour d'appel a violé l'article L. 643-11 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article R. 643-20 du même code.
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Caution / Cautionnement
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