par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
Cass. civ. 1, 9 juin 2017, 16-21247
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Cour de cassation, 1ère chambre civile
9 juin 2017, 16-21.247
Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Gestion d'affaires
Prescription
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 16 juin 2016) que le notaire chargé du règlement de la succession de Jacques X..., décédé le 26 octobre 2005, a demandé à la société Coutot Roehrig (le généalogiste) de procéder à des recherches en vue d'identifier les héritiers ; que Mme Y..., cousine germaine du défunt dans la branche maternelle, ayant refusé de signer le contrat de révélation de succession proposé par le généalogiste, celui-ci l'a assignée en paiement de sa rémunération sur le fondement de la gestion d'affaires ;
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés :
Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'écarter l'application de la prescription biennale de l'article L. 137-2 du code de la consommation et de dire, en conséquence, le généalogiste recevable en ses demandes, alors, selon le moyen, que l'article L. 137-2 du code de la consommation prévoit que « l'action » des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit en deux ans ; que la cour d'appel, qui a considéré que la prescription n'était pas acquise au motif que l'action du généalogiste n'était pas fondée sur des dispositions contractuelles mais sur la gestion d'affaires, a ajouté une condition non prévue par le texte qui vise « l'action » des professionnels contre un particulier et donc toutes les actions d'un professionnel contre un particulier pour les biens et services rendus, qu'elle a violé l'article précité ;
Mais attendu que la gestion d'affaires ne relève pas de la prescription édictée par l'article L. 137-2, devenu L. 218-2 du code la consommation en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, applicable uniquement à l'action des professionnels pour les biens et services qu'ils fournissent contractuellement aux consommateurs ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir écarté l'application de la prescription biennale de l'article L 137-2 du code de la consommation et dit en conséquence, la société Coutot Reohrig recevable en ses demandes
Aux motifs que la demande de la société Coutot Roehrig est fondée sur la gestion d'affaires et non sur les dispositions contractuelles inexistantes en l'espèce ; que Madame Y... n'est donc pas fondée à se prévaloir de la prescription biennale ; que pour les mêmes motifs l'argumentation développée par Madame Y... sur la violation des dispositions contractuelles, l'absence de cause, d'objet ou d'aléa est inopérante
Alors que l'article L 137-2 du code de la consommation prévoit que « l'action » des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit en deux ans ; que la cour d'appel qui a considéré que la prescription n'était pas acquise au motif que l'action de la société Coutot Roehrig n'était pas fondée sur des dispositions contractuelles mais sur la gestion d'affaires, a ajouté une condition non prévue par le texte qui vise « l'action » des professionnels contre un particulier et donc toutes les actions d'un professionnel contre un particulier pour les biens et services rendus, qu'elle a violé l'article précité
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Y... à payer à la Société Coutot Roehrig la somme de 35.000€ avec intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2011
Aux motifs que l'article 1375 du code civil dispose que « le maître dont l'affaire a été bien administrée doit remplir les engagements que le gérant a contractés en son nom, l'indemniser de tous les engagements personnels qu'il a pris et lui rembourser toutes les dépenses utiles ou nécessaires qu'il a faites » ; qu'il n'est pas contesté que Madame Y... a appris le décès de son cousin Jacques X... peu avant que la société Coutot Roehrig ne la contacte ; que cependant Madame Y... qui fait état, pour le surplus , des contacts qu'elle avait conservés avec son cousin et de ses compétences spécifiques en matière juridique et d'état civil, en tant qu'ancienne adjointe au maire, n'établit par aucun document qu'elle avait connaissance de ce qu'elle pouvait utilement venir en qualité de successible de Jacques X... dans la branche maternelle ni qu'elle connaissait l'identité et les coordonnées des vingt et un autres héritiers dans la branche paternelle, ignorés du notaire sans l'intervention desquels la dévolution successorale ne pouvait s'opérer ; qu'elle ne fournit pas davantage d'explications sur les documents qu'elle aurait pu avoir en sa possession qui auraient pu permettre au notaire d'établir la liste des vingt-trois autres cousins germains venant à la succession, recensés par la société Coutot Roehrig dans les deux branches, étant au surplus relevé qu'un des cousins germains de la branche paternelle étant décédé, il laissait lui-même pour lui succéder son épouse et ses trois enfants ; que si Madame Y... indique s'être opposée à plusieurs reprises à l'intervention de la société Coutot Roehrig, le courriel du 24 février 2006 qu'elle a adressé au notaire pour lui indiquer qu'elle ne voyait pas l'utilité de missionner le cabinet Coutot Roehrig ne suffit pas à caractériser son opposition formelle à l'intervention du généalogiste mandaté le 4 janvier précédent par le notaire ; que ce courrier n'a été suivi d'aucun autre de sa part manifestant une quelconque opposition à cette intervention ; que la lettre adressée le 10 avril 20056 par Madame Y... à la société Coutot Roehrig pour l'informer de ce que son notaire avait pris contact avec le notaire en charge de la succession pour lui demander de l'intégrer dans le traitement du dossier, ne constitue pas une opposition expresse de Madame Y... à l'intervention du généalogiste qui durait déjà depuis trois mois ; qu'au surplus, Madame Y... présente au rendez-vous de signature de l'acte de notoriété établissant les qualités successorales de chacun des héritiers, a signé sans réserve ce document dressé au vu des travaux effectués par la société Coutot Roehrig et n'a par la suite émis aucune contestation ; que par ailleurs les démarches personnelles que Madame Y... a pu faire après l'intervention du généalogiste , tant auprès du notaire que les services fiscaux, ne font pas disparaître l'opportunité du travail préalable effectué par la société Coutot Roehrig ni son utilité pour le règlement de la succession ; que l'intervention de la société Coutot Roehrig a été utile non seulement aux autres héritiers signataires d'un contrat de révélation de succession mais également à Madame Y... ; qu'elle a permis la détermination de la quotité de la vocation successorale de Madame Y... et l'établissement de l'acte de notoriété sans lequel elle n'aurait pas pu percevoir la somme de 398.327€ ; que Madame Y... est en conséquence tenue d'indemniser la société Coutot Roehrig de tous les engagement personnels pris par celle-ci et de lui rembourser toutes les dépenses utiles ou nécessaires qu'elle a faites ;
1° Alors que le généalogiste ne peut prétendre à rémunération sur le fondement de la gestion d'affaires que s'il rapporte la preuve de l'utilité de son intervention pour la personne concernée; que la cour d'appel qui a retenu l'utilité de l'intervention de la société Coutot Roehrig au motif que Madame Y... n'apportait pas la preuve qu'elle avait connaissance qu'elle pouvait venir utilement en qualité de successible de Jacques X... ni qu'elle connaissait l'identité des 21 autres héritiers ou encore qu'elle n'avait pas fourni d'éléments qui auraient pu permettre au notaire d'établir la liste des autres cousins germains venant à la succession, a fait peser la charge de la preuve sur Madame Y... en violation de l'article 1315 du code civil
2° Alors que lorsqu'une partie a fait opposition à l'intervention d'un généalogiste, ce dernier ne peut se prévaloir d'une gestion d'affaires ; que la cour d'appel qui a considéré que le courriel adressé le 24 février 2006 par Madame Y... au notaire pour indiquer qu'elle ne voyait pas l'utilité de missionner le cabinet Coutot Roehrig ni son courrier du 10 avril 2006, adressé au généalogiste pour l'informer de ce que son notaire avait pris contact avec le notaire chargé de la succession pour lui demander de l'intégrer dans le traitement du dossier, ne caractérisaient une opposition à l'intervention du généalogiste, sans s'expliquer sur le fait que Madame Y... avait également dès l'origine et par la suite refusé de signer tout contrat avec cette société, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1372 du code civil
3° Alors que l'opposition d'une partie à l'intervention du généalogiste faisant obstacle à la gestion d'affaires, n'est pas nécessairement formelle ou expresse; que la cour d'appel qui a considéré que le courriel du 24 février 2006 dans lequel Madame Y... avait indiqué au notaire qu'elle ne voyait pas l'utilité de missionner le généalogiste ne constituait pas une opposition formelle à l'intervention du généalogiste et que le courrier du 10 avril 2016 de Madame Y... ne constituait pas une opposition expresse à cette intervention si bien que la société Coutot et Roehrig pouvait se prévaloir de la gestion d'affaires, a violé les dispositions de l'article 1372 du code civil
4° Alors que le courriel adressé par Madame Y... au notaire le 24 février 2006 est ainsi rédigé : « je ne vois pas l'utilité pour moi de missionner le CT Coutot, dans la mesure où je me présente à vous spontanément, merci donc de m'intégrer à la succession que vous devez régler. Merci de me préciser ce que vous attendez de moi dans le cadre de cette mission. » ; que pour décider que ce courrier ne constituait pas une opposition à l'intervention du généalogiste, la cour d'appel a énoncé que l'exposante avait adressé au notaire un courriel pour lui indiquer qu'elle ne voyait pas l'intérêt de missionner le cabinet Coutot Roehrig ; qu'en se dispensant de reprendre ce courriel en son intégralité, elle l'a dénaturé en violation de l'article 1134 du code civil
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame Y... à payer à la société Coutot Roehrig la somme de 35.000 € TTC avec intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2011
Aux motifs que pour critiquer le montant réclamé, Madame Y... fait valoir que la société Coutot Roehrig n'a jamais fourni le détail des diligences accomplies pour l'établissement de la dévolution successorale ni plus particulièrement celles accomplies dans son intérêt ; qu'elle se prévaut également de l'irrégularité de la facture de 50.000€ produite par la société Coutot Roehrig ce qui est sans incidence sur la solution du litige ; que l'indemnisation de la société Coutot Roehrig doit tenir compte de la réalité des diligences accomplies et des frais exposés ; que contrairement à ce que soutient Madame Y..., les diligences à considérer ne se limitent pas à celles effectuées pour l'identifier mais doivent s'étendre à celles accomplies pour retrouver les nombreux autres héritiers notamment de la branche paternelle dans la mesure où ces identifications étaient nécessaires à l'établissement de la dévolution successorale ; que si la société Coutot Roehrig ne fournit aucun document permettant de quantifier le temps et les frais qu'elle a pu exposer, elle relève à juste titre que l'organisation dont elle dispose et les investissements qu'elle a réalisés pour constituer des bases de données permettant des recherches informatiques constituent des frais à considérer pour l'évaluation de son indemnisation qu'aucune disposition législative n'interdit de revêtir un caractère forfaitaire ; qu'eu égard aux éléments de la cause dont le nombre d'héritiers qu'il a été nécessaire de retrouver pour permettre la dévolution successorale, la cour dispose des éléments pour fixer la juste indemnisation de la société Coutot Roehrig à la somme de 35.000 € ;
Alors que le gérant d'affaires ne peut prétendre qu'au remboursement des dépenses utiles ou nécessaires qu'il a faites pour être utile au maître ; que pour en fixer le montant, les juges du fond sont tenus de déterminer les diligences accomplies dans la gestion de l'affaire concernée et les frais engagés ; que la cour d'appel qui a constaté que la société Coutot Roehrig ne produisait aucun élément permettant de quantifier les frais et le temps passé qu'elle avait exposé, mais énoncé qu'il convenait de prendre en considération l'organisation dont elle dispose et les investissement importants réalisés pour exercer son activité, sans constater les diligences effectivement accomplies et les frais engagés dans le cadre de la recherche des héritiers de Monsieur X..., s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser les dépenses utiles ou nécessaires accomplies utiles à Madame Y..., n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1375 du code civil
Alors que, de plus, les juges du fond sont tenus de motiver leurs décisions ; qu'ils ne peuvent se fonder sur les simples allégations des parties sans viser et analyser même sommairement les pièces sur lesquelles ils se fondent ; que la cour d'appel qui a énoncé que la société Coutot Roehrig ne fournissait aucun document pour quantifier le temps et les frais qu'elle a pu exposer mais qu'il fallait prendre en considération l'organisation de la société pour l'exercice de son activité ainsi que ses investissements et bases de données informatiques, la cour d'appel qui n'a visé aucun document justificatif et qui s'est fondée sur les allégations de la société Coutot Roehrig a violé l'article 455 du code de procédure civile
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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Gestion d'affaires
Prescription
Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 28/04/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.