par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



Cass. soc., 15 novembre 2011, 10-20891
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Cour de cassation, chambre sociale
15 novembre 2011, 10-20.891

Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Sécurité sociale
Droit du Travail




LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en matière de référé (Paris, 27 mai 2010), qu'un accord d'entreprise conclu le 4 juillet 1996 au sein de l'Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), prévoit que l'employeur, en collaboration avec les organisations syndicales, définit un contrat "frais de santé" visant à indemniser des frais médicaux restés à la charge de l'assuré et complétant les prestations servies par la sécurité sociale et soumet cet accord à un référendum auprès du personnel ; qu'après dénonciation d'un premier contrat de prévoyance facultatif souscrit en 1997, l'employeur a soumis à référendum en octobre 2007 un nouveau régime d'assurance obligatoire auprès de l'institution Novalis prévoyance et sur lequel l'accord des syndicats n'avait pas été obtenu ; que ses propositions ayant été approuvées à la majorité des suffrages exprimés l'employeur a souscrit le contrat proposé par Novalis prévoyance avec adhésion obligatoire des salariés devant prendre effet au 1er janvier 2008 ;

Attendu que l'AFPA fait grief à l'arrêt de dire que, dans la mesure où il n'a pas été approuvé par la majorité des salariés inscrits sur la liste électorale lors du référendum du 16 octobre 2007, le régime de frais de santé Novalis prévoyance a un caractère facultatif pour l'ensemble des salariés de l'AFPA et que celle-ci ne peut leur imposer de cotiser à ce régime alors, selon le moyen, que lorsqu'un accord collectif instaurant, conformément à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, un régime de garanties collectives complémentaires à celles servies par la sécurité sociale, prévoit que ces garanties sont soumises au personnel par voie de référendum, sans préciser les modalités de cette consultation, l'absence d'accord avec les organisations syndicales pour fixer les modalités de ce référendum conventionnel autorise l'employeur à en fixer librement les conditions, dès lors qu'elles ne contreviennent pas aux principes généraux du droit électoral ; qu'en l'espèce, l'article 65 de l'accord du 4 juillet 1996 prévoit que "l'AFPA souscrit au bénéfice de l'ensemble de ses salariés un contrat unique "frais de santé". Ce contrat vise à indemniser des frais médicaux restés à la charge de l'assuré et complète les prestations servies par la sécurité sociale. Ce contrat est défini en collaboration avec les organisations syndicales et est soumis au personnel par voie de référendum" ; qu'en l'absence d'accord avec les organisations syndicales sur les modalités du référendum organisé au mois d'octobre 2007 pour soumettre aux salariés une garantie "frais de santé" obligatoire, l'AFPA avait prévu que ce régime serait adopté à la majorité des votants ; qu'en jugeant néanmoins que la majorité doit être calculée par rapport au nombre des inscrits sur la liste électorale et non sur celui des votants eu égard à l'objet du référendum, la cour d'appel qui a ainsi refusé de faire application des modalités fixées par l'employeur, a violé l'article 65 de l'accord du 4 juillet 1996 et l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu, selon l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, que lorsqu'elles ne sont pas déterminées par voie de conventions ou d'accords collectifs, des garanties collectives en complément de celles de la sécurité sociale ne peuvent être instaurées de manière obligatoire pour les salariés qu'à condition que les propositions de l'employeur aient été ratifiées par référendum à la majorité des intéressés, ce qui s'entend de la majorité des électeurs inscrits ; que ni un accord collectif ni une décision unilatérale de l'employeur ne peuvent subordonner l'entrée en vigueur d'un régime obligatoire à des exigences moindres ;

Et attendu qu'après avoir constaté que si les propositions tendant à l'instauration d'un régime obligatoire avaient, lors du référendum organisé par l'AFPA en octobre 2007, été approuvées à la majorité des suffrages exprimés, ces derniers ne représentaient pas la majorité des inscrits, c'est à bon droit que la cour d'appel, faisant application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, en a déduit que le contrat de prévoyance souscrit auprès de Novalis prévoyance avait un caractère facultatif pour l'ensemble des salariés de l'AFPA et que cette dernière ne pouvait les contraindre à y cotiser ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;


Condamne l'AFPA aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer au syndicat CGT-FO des agents de la formation professionnelle des adultes la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR, infirmant le jugement entrepris, dit que dans la mesure où il n'a pas été approuvé par la majorité des salariés inscrits sur la liste électorale lors du référendum du 16 octobre 2007, le régime de frais de santé NOVALIS PREVOYANCE a un caractère facultatif pour l'ensemble des salariés de l'AFPA et que celle-ci ne peut leur imposer de cotiser à ce régime et d'avoir condamné l'AFPA à verser au syndicat 4000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE « Considérant que l'AFPA est une association soumise au régime de la loi de 1901 qui est placée sous la tutelle de l'Etat ;

Que ses salariés relèvent du statut de droit privé qui est notamment régi par un accord d'entreprise, en date du 4 juillet 1996, dont l'article 65, relatif aux frais de santé, stipule :

« L'AFPA souscrit au bénéfice de l'ensemble de ses salariés un contrat unique « frais de santé ».

Ce contrat vise à indemniser des frais médicaux restés à la charge de l'assuré et complète les prestations servies par la Sécurité Sociale.

Ce contrat est défini en collaboration avec les organisations syndicales et est soumis au personnel par voie de référendum.

Le financement est assuré par une cotisation assise sur la rémunération ou exprimée forfaitairement. La cotisation fait l'objet d'une répartition entre l'employeur et les salariés » ;

Que, pour la mise en oeuvre de cet accord, elle a conclu un accord de méthodologie le 30 septembre 1996, a organisé un référendum le 3 décembre 1996, puis, par accord du 21 janvier 1997, a instauré un régime d'assurance de santé complémentaire facultatif pour ses salariés par la souscription d'un contrat auprès de l'organisme PRO-BTP ;

Qu'elle a dénoncé cet accord du 21 janvier 1997, le 14 décembre 2006, et résilié le contrat d'assurance santé complémentaire souscrit auprès de l'organisme PRO-BTP, avec effet au 31 décembre 2007 ;

Qu'elle a organisé, au cours du premier semestre 2007, une concertation avec les organisations syndicales pour mettre en place un nouveau régime d'assurance maladie ; qu'après trois réunions, les 27 février, 21 mars et 4 avril 2007, en l'absence d'accord sur le caractère obligatoire ou facultatif du nouveau régime, elle a décidé de soumettre la question aux salariés par voie de référendum; qu'en l'absence d'accord avec les organisations syndicales sur la question relative à la majorité à prendre en compte pour l'adoption du référendum, elle a rédigé le règlement de la consultation lequel prévoyait : « le référendum est acquis à la majorité de 50% plus un des votants. Les votants sont constitués par l'ensemble des inscrits moins le absentions. Sont considérés comme votants les votes blancs et nuls » ;

Considérant que le référendum s'est déroulé par correspondance du 2 au 15 octobre 2007 et que le dépouillement des votes réalisé le 16 octobre 2007 a donné les résultats suivants :

- salariés inscrits : 10517
- salariés votants : 7066
- bulletins valablement exprimés : 7027
- bulletins blancs : 10
- bulletins nuls : 29 5
- votes oui : 4277 soit 60,53% des votants et 40,67% des inscrits
- votes non : 2750 soit 38,92% des votants et 26,15% des inscrits ;

Considérant que l'AFPA a mis en place un régime d'assurance santé complémentaire obligatoire pour l'ensemble des salariés par la souscription d'un contrat auprès de l'Institution de prévoyance NOVALIS PREVOYANCE ;

Que le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE des agents de la Formation Professionnelle des Adultes a fait citer l'AFPA devant le tribunal de grande instance de Bobigny, par assignation du 20 décembre 2007, pour voir dire que l'adhésion au régime de prévoyance de frais de santé de NOVALIS PREVOYANCE n'avait pas de caractère obligatoire, et l'Institution de prévoyance NOVALIS PREVOYANCE, par assignation du 4 janvier 2008, aux fins d'opposabilité du jugement à intervenir ;

Que le tribunal de grande instance a débouté le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE- des agents de la Formation Professionnelle des Adultes de ses demandes ;

Que le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE des agents de la Formation Professionnelle des Adultes a interjeté appel ;

Sur le caractère obligatoire ou facultatif du régime de frais de santé NOVALIS Considérant que le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE des agents de la Formation Professionnelle des Adultes soutient que le régime d'assurance santé complémentaire n'a pas été approuvé par la majorité des salariés intéressés, lors du référendum du 16 octobre 2007, conformément aux dispositions de l'article L.911-1 du code de la sécurité sociale qui prévoit que les garanties collectives dont bénéficient les salariés en complément de celles qui résultent de l'organisation de la sécurité sociale sont déterminées, soit par voie de conventions ou d'accords collectifs, soit à la suite de la ratification à « la majorité des intéressés » d'un projet d'accord proposé par le chef d'entreprise, soit par une décision unilatérale du chef d'entreprise ;

Qu'il affirme, qu'au sens de ce texte, la majorité doit s'entendre de la majorité des inscrits et non des votants ; qu'il en conclut que le régime de frais de santé NOVALIS PREVOYANCE ne peut donc présenter qu'un caractère facultatif, dans la mesure où il n' a pas été approuvé par la majorité des salariés inscrits, en précisant qu'il n'a jamais contesté la régularité du référendum ;

Considérant que l'AFPA répond que la mise en place du régime de prévoyance et de "frais de santé provient de l'accord collectif du 4 juillet 1996 renvoie, pour la définition du contenu du régime frais de santé, à une nouvelle collaboration avec les organisations syndicales et, en son article 65, à un référendum auprès des salariés ; qu'elle affirme que cet accord est soumis aux règles des articles L.2221-1 et suivants du code du travail et non à celles de l'article L.911-1 du code de la sécurité sociale ; qu'elle ajoute que le syndicat ne peut contester l'analyse des résultats du référendum, car il n'a pas contesté la régularité du scrutin devant le juge d'instance dans les 15 jours suivant le référendum ;

Considérant que l'Institution de prévoyance NOVALIS PREVOYANCE dit s'en rapporter sur le mérite des demandes soumises par le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE des agents de la Formation Professionnelle des Adultes et par l'AFPA ;

Considérant que le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE des agents de la Formation Professionnelle des Adultes ne conteste pas la régularité du scrutin, mais uniquement l'analyse des résultats du référendum qui a été faite par l'AFPA ; qu'ainsi, le litige qui oppose les parties n'avait pas à être porté devant le juge d'instance dans les 15 jours suivant le référendum ;Considérant que, compte tenu de l'objet du référendum, qui vise à instaurer un nouveau régime d'assurance santé complémentaire au sein de l'AFPA, et du caractère obligatoire pour tous les salariés de l'adhésion au régime de frais de santé NOVALIS PREVOYANCE, qui aura des conséquences financières sur leur rémunération en raison du prélèvement d'une cotisation salariale supplémentaire, les résultats du vote concernent, nécessairement, l'ensemble des salariés de l'AFPA ; Qu'en conséquence, peu important le cadre juridique dans lequel le référendum du mois d'octobre 2007 est intervenu au sein de l'AFPA, soit en application des dispositions de l'article 65 de l'accord collectif du 4 juillet 1996, soit en application de celles de l'article L.911-1 du code de la sécurité sociale, la majorité doit être calculée par rapport au nombre des inscrits sur la liste électorale et non sur celui des votants ;

Que le nombre des votes oui, enregistrés lors du référendum du 16 octobre 2007, ne représentant que 40,67% des salariés inscrits sur la liste électorale, le régime de fiais de santé NOVALIS PREVOYANCE ne peut avoir qu'un caractère facultatif pour l'ensemble des salariés de l'AFPA ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de débouter l'AFPA de sa demande et d'infirmer le jugement déféré sur ce point ;

Sur l'interdiction à l'AFPA, sous astreinte, d'imposer à ses salariés de cotiser au régime obligatoire de NOVALIS Considérant que le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE des agents de la Formation Professionnelle des Adultes demande à la Cour de faire défense à l'AFPA, sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée à compter du 2ème mois après la signification de l'arrêt à intervenir, d'imposer à ses salariés de cotiser au régime « obligatoire » de NOVALIS et de se réserver la liquidation de l'astreinte sur simple requête ;

Considérant que le régime de frais de santé NOVALIS PREVOYANCE ayant un caractère facultatif pour l'ensemble des salariés de l'AFPA, celle-ci ne peut leur précompter la cotisation afférente à ce régime sans leur accord ;

Qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à la demande du syndicat tendant à faire défense à l'AFPA d'imposer aux salariés de cotiser audit régime de manière obligatoire et d'infirmer le jugement déféré sur ce point ; Considérant, par contre, qu'aucun des éléments du dossier ne fait apparaître que l'AFPA entend ne pas appliquer le présent arrêt ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, de débouter le Syndicat National CGT FORCE OUVRIERE des agents de la Formation Professionnelle des Adultes de sa demande d'astreinte ;

Sur l'opposabilité de l'arrêt à l'Institution de prévoyance NOVALIS PREVOYANCE Considérant que le présent arrêt doit être déclaré opposable à l'Institution de prévoyance NOVALIS PREVOYANCE »

ALORS QUE lorsqu'un accord collectif instaurant, conformément à l'article L 911-1 du Code de la sécurité sociale, un régime de garanties collectives complémentaires à celles servies par la sécurité sociale, prévoit que ces garanties sont soumises au personnel par voie de référendum, sans préciser les modalités de cette consultation, l'absence d'accord avec les organisations syndicales pour fixer les modalités de ce référendum conventionnel autorise l'employeur à en fixer librement les conditions, dès lors qu'elles ne contreviennent pas aux principes généraux du droit électoral ; qu'en l'espèce, l'article 65 de l'accord du 4 juillet 1996 prévoit que « L'AFPA souscrit au bénéfice de l'ensemble de ses salariés un contrat unique « frais de santé ». Ce contrat vise à indemniser des frais médicaux restés à la charge de l'assuré et complète les prestations servies par la Sécurité Sociale. Ce contrat est défini en collaboration avec les organisations syndicales et est soumis au personnel par voie de référendum » ; qu'en l'absence d'accord avec les organisations syndicales sur les modalités du référendum organisé au mois d'octobre 2007 pour soumettre aux salariés une garantie « frais de santé » obligatoire, l'AFPA avait prévu que ce régime serait adopté à la majorité des votants ; qu'en jugeant néanmoins que la majorité doit être calculée par rapport au nombre des inscrits sur la liste électorale et non sur celui des votants eu égard à l'objet du référendum, la Cour d'appel qui a ainsi refusé de faire application des modalités fixées par l'employeur, a violé l'article 65 de l'accord du 4 juillet 1996 et l'article 1134 du Code civil.



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Cette décision est visée dans les définitions suivantes :
Sécurité sociale
Droit du Travail


Décision extraite de la base de données de la DILA (www.legifrance.gouv.fr - mise à jour : 09/05/2018) conformément à la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016.