par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles



DESPECIALISATION DEFINITION
Dictionnaire juridique

Définition de Déspécialisation

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Baumann Avocats Droit informatique

Le mot "déspécialisation" désigne le changement de la destination des locaux commerciaux donnés à bail telle que cette destination est fixée par le contrat. Elle peut être partielle par adjonction d'une activité connexe ou complémentaires : par exemple, à l'activité de débit de boissons sera ajouté un débit de tabacs. Elle peut être totale ou plénière, ce sera le cas où le locataire d'un fonds de commerce de blanchisserie souhaitera transformer l'objet de son commerce en épicerie.

Le locataire doit solliciter le bailleur en l'informant par acte d'huissier de justice, en indiquant les activités dont l'exercice est envisagé. Le propriétaire dispose d'un délai de deux mois, à peine de déchéance. Si le bailleur n'a pas signifié son refus par acte extra-judiciaire, il est réputée avoir acquiescé à la demande de déspécialisation (3°chambre civile 11 juin 2008, pourvoi n°07-14551, Legifrance)

Les nouvelles activités que le locataire souhaite exercer dans les lieux loués, doivent être compatibles avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble ou de l'ensemble immobilier et ne pas concurrencer les autres commerces de l'immeuble. En cas de contestation, le tribunal se prononce en fonction notamment de l'évolution des usages commerciaux, de la conjoncture économique et aux nécessités de l'organisation rationnelle de la distribution. En général le bailleur subordonne son accord à une révision du loyer. Si le différend porte seulement sur le prix du bail, celui-ci est fixé conformément aux dispositions réglementaires prévues pour la fixation du prix des baux révisés. Les dispositions de l'article L. 145-47 du Code de commerce sont d'ordre public et ne peuvent être écartées que par une renonciation intervenant une fois acquis le droit à la déspécialisation. (3°chambre civile, 19 mai 2004, pourvoi n°03-11303, Legifrance).

Si le locataire transforme la destination des lieux ou s'il adjoint à son commerce de nouvelles activités sans utiliser la procédure légale ou sans attendre l'issue de l'instance en déspécialisation qu'il a engagée et qu'il n'a pas obtempéré dans le délai d'un mois au commandement visant la clause résolutoire qui lui faisait injonction de respecter la destination du bail, le bailleur peut se prévaloir de la clause résolutoire insérée au bail (3°chambre civile 28 mai 2003, pourvoi n°02-11155, Legifrance) ou faire résilier le bail par le Tribunal.

Il arrive que le locataire prétende qu'en fait, le bailleur ne pouvait pas méconnaître les changements qu'il avait déjà apportés à la destination des lieux et que de ce fait il avait donné un accord tacite à cette modification. Si le tribunal saisi par le bailleur fait droit à l'argumentation du locataire, il devra alors en motivant sa décision, caractériser la renonciation du bailleur à se prévaloir de l'infraction constituée par le changement de destination des lieux. Il ne suffirait pas que le tribunal prenne pour motif la circonstance que, selon le locataire, l'activité de petite restauration exercée dans les lieux loués était connue du bailleur précédent et de celui qui représente l'indivision actuellement propriétaire des lieux, qui l'auraient ainsi tacitement acceptée. (3°chambre civile 5 juin 2002, pourvoi n°00-20348, Legifrance).

Voir aussi le mot : Destination

Textes

  • Code civil, articles 1728 et 1729.
  • Code de commerce, articles L145-47 à L145-55.
  • Décret n°53-960 du 30 septembre 1953, réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux, articles 34 et s.
  • Loi n°65-356 du 12 mai 1965. modifie et complète le décret ci-dessus.
  • Bibliographie

  • Auque (F.), Les baux commerciaux : théorie et pratique - LGDJ 1996.
  • Boulanger, Les rapports entre l'activité concurrentielle et l'affectation des locaux à usage commercial, Dalloz 1974, 171.
  • Chatelain et Gauthier, La concurrence dans les centres commerciaux, JCP 1981, éd. CI, II. 13643.
  • Monéger (J.), Observations sous 3e Civ., 19 mai 2004, Bull., III, n° 101, p. 92, RTC, janvier-mars 2005, n° 1, p. 53-55.

  • Liste de toutes les définitions