par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
INTERETS MORATOIRES DEFINITION
Dictionnaire juridique
Définition de Intérêts moratoires
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Au pluriel, les "intérêts" représentent une somme d'argent calculée en pourcentage du montant du capital dont le montant est fonction de la durée de l'opération à l'occasion de laquelle ils sont perçus. Les intérêts représentent le loyer de l'argent. La créance d'une somme d'argent née et déterminée dans son montant antérieurement à toute décision du juge qui se borne à la constater, porte intérêts à compter de la sommation de payer (Première Chambre civile 14 octobre 2010, pourvoi n°09-12921 et Legifrance). Consulter aussi, Ass. Plén., 4 mars 2005, pourvoi n°02-14316, Bull. 2005, Ass. plén., n°3 ; Com., 5 décembre 2006, pourvois n°04-18621 et 04-18647, Bull. 2006, IV, n°237
Les intérêts sont dus non seulement dans les prêts d'argent (articles 1905 et suivants du Code civil) mais aussi dans le cas d'un retard dans le paiement d'une dette. Les condamnations que prononcent les tribunaux comportent de plein droit la condamnation au paiement des intérêts calculés à un taux qui est fixé chaque année dans la loi de finances. A cet égard il faut rappeler qu'on ne doit pas parler d'"intérêts légaux" mais d'"intérêts au taux légal". Sauf dans les cas où la loi les fait courir de plein droit, les intérêts moratoires sont dus à partir de la sommation ou de la demande en justice, à moins qu'ils n'aient été réclamés à compter d'une date postérieure auquel cas ils sont dus à compter de cette dernière date (chambre sociale 10 février 2010, pourvoi n°08-45109, Legifrance). Voir les articles R313-1 et suivants du Code de la consommation.
La clause d'un contrat de prêt prévoyant le paiement d'intérêts à un certain taux jusqu'à l'échéance fixée pour le remboursement suffit pour que les intérêts continuent à courir après ladite échéance, si le débiteur ne se libère pas à cette époque (Chambre commerciale 18 janvier 2017, pourvoi n°15-14665, BICC n°863 du 1er juin 2017 et Legifrance.).
L'expression "intérêt légal" que de nombreux professionnels utilisent, est impropre on doit dire "intérêts au taux légal". En application de l'article L. 313-2 du Code monétaire et financier, un décret fixait jusqu'alors le taux de l'intérêt légal. Pour l'année 2014 il était fixé comme en 2013, à 0,04 %. De nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 5 octobre 2014 pour le calcul du taux légal applicable à partir du 1er janvier 2015. Le décret n°2014-1115 du 2 octobre 2014 définit ce taux comme la somme du taux directeur de la Banque centrale européenne et une partie de la différence entre le taux représentatif d'un taux de refinancement de la catégorie considérée (particuliers ou autres cas) et le taux directeur de la Banque centrale. Il précise en outre que le ministre chargé de l'Économie fait procéder à la publication par arrêté au Journal officiel des taux qui serviront de référence le semestre suivant.
Ce taux est utilisé en matière fiscale pour le calcul des intérêts moratoires et d'intérêts créditeurs. Il est également appliqué en l'absence de stipulations conventionnelles, pour le calcul des intérêts moratoires en cas de retard dans le paiement d'une dette. Et, conformément à l'article L. 313-3 du Code monétaire et financier, il s'apprécie avec une majoration de cinq points en cas de condamnation prononcée par une décision de justice. Il s'applique à tout calcul s'y référant du 1er janvier au 31 décembre de l'année en cours.
L'ordonnance n°2014-947 du 20 août 2014 relative au taux de l'intérêt légal a modifié à compter du 1er janvier 2015 l'article L.313-2 du code monétaire Le décrêt a promulgué des dispositions aux termes desquelles le taux de l'intérêt légal qui sera, en toute matière, fixé par décret, pour la durée d'une année civile, comprendra un taux applicable lorsque le créancier est une personne physique qui n'agit pas pour des besoins professionnels, et un second taux qui sera applicable dans tous les autres cas. Les modalités de calcul et de publicité de ces taux seront fixées par décret.
En application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, en cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision. Le titre exécutoire que l'huissier de justice est autorisé à établir en application de l'article L. 131-73 du code monétaire et financier, en l'absence de justification du paiement du montant d'un chèque et des frais dans un délai de quinze jours à compter de la réception de la notification d'un certificat de non-paiement au tireur du chèque, ne constitue pas une décision de justice (2eme Chambre civile 7 janvier 2016, pourvoi n°14-26449 BICC n°842 du 15 mai 2016 et Legifrance).
En matière de prêt d'argent, consenti à un débiteur non commerçant, l'exigence d'un écrit mentionnant le taux de l'intérêt conventionnel est une condition de la stipulation d'intérêt. En l'absence d'un accord écrit sur ce point, l'indication du taux d'intérêt sur les relevés de compte d'une banque ne répond pas à cette exigence, alors même qu'elle ne fait pas l'objet d'une protestation de la part du client. (Chambre commerciale 13 novembre 2012, pourvoi n°11-25596), BICC n°777 du 1er mars 2013 et Legifrance). Les taux d' intérêts convenus se rapportant à certaines opérations de crédit (crédits immobiliers et crédits à la consommation) font l'objet d'une réglementation particulière. En cas d'ouverture de crédit en compte courant, l'obligation de payer dès l'origine des agios conventionnels par application du taux effectif global exige non seulement que le taux effectif global soit porté à titre indicatif sur un document écrit préalable, mais aussi que le taux effectif global appliqué soit porté sur les relevés périodiques, reçus par l'emprunteur sans protestation ni réserve. (Cass. Com. 22 mai 2007, BICC n°668 du 1er octobre 2007). La Chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que viole les articles 1134 et 1907 du code civil, ensemble l'article L. 313-1 du code de la consommation, la cour d'appel qui, pour exclure de l'assiette du taux effectif global les frais prélevés par une banque à l'occasion de chaque opération effectuée au-delà du découvert autorisé, au moyen d'une carte bancaire, retient que ces frais sont distincts de l'opération de crédit proprement dite que constitue le découvert et constituent la rémunération d'un service offert par la banque pour permettre d'honorer une transaction, alors que la rémunération d'une telle prestation n'est pas indépendante de l'opération de crédit complémentaire résultant de l'enregistrement comptable d'une transaction excédant le découvert autorisé. (Com. - 5 février 2008, BICC n°682 du 15 mai 2008). S'agissant d'intérêts débiteurs en compte courant il est jugé que la prescription de l'action en nullité de l'intérêt conventionnel engagée par un emprunteur qui a obtenu un concours financier pour les besoins de son activité professionnelle court à compter du jour où il a connu ou aurait dû connaître le vice affectant le taux effectif global (TEG). Le point de départ de cette prescription, dans le cas d'un découvert, est la réception de chacun des écrits indiquant ou devant indiquer le TEG appliqué. La mention sur les relevés périodiques de compte du taux effectif global régulièrement calculé pour la période écoulée vaut information de ce taux pour l'avenir à titre indicatif, et, suppléant l'irrégularité du taux figurant dans le contrat initial, emporte obligation, pour le titulaire du compte, de payer les intérêts au taux conventionnel à compter de la réception sans protestation ni réserve de cette information, même si le taux effectif global constaté a posteriori, qu'il soit fixe ou variable, est différent de celui qui a été ainsi communiqué. (Chambre commerciale, 10 mars 2015, pourvoi n°14-11616, BICC n°824 du 15 juin 2015 et Legifrance). On peur consulter la note de Mad. D. 2015, somm., p. 676, note de Mad. V. Avena-Robardet, Dalloz 2015, somm., p. 676.
Après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que le taux effectif glogal (TEG) était erroné, faute d'inclusion du taux de cotisation mensuelle d'assurance réellement prélevé, et fait ressortir que l'erreur commise était supérieure à la décimale prescrite par l'article R. 313-1 du code de la consommation, une cour d'appel a retenu, à bon droit, que la sanction de l'erreur affectant le TEG était la déchéance du droit aux intérêts de la banque dans la proportion fixée par le juge. (Première Chambre civile 10 juin 2020, pourvoi n°18-24287, Legifrance).)
Si un tribunal est saisi d'une demande en restitution des intérêts résultant de l'application de dates de valeurs dépourvues de cause, cette procédure peut être engagée dans un délai de cinq ans à partir de la perception des intérêts contestés. L'action est recevable même en l'absence de demande en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels qui pourrait être fondée sur la méconnaissance des dispositions légales d'ordre public concernant l'obligation d'un écrit fixant le TEG (Chambre commerciale 16 mars 2010, pourvoi n°09-11236, BICC n°726 du 15 juillet 2010 et Legifrance). Consulter la note de M. Martin référencée dans la Bibliographie ci-après.
L'intérêt au taux légal est la compensation accordée par la loi au créancier d'une dette d'argent dont la créance a été judiciairement reconnue. Il est dû de droit, même si le créancier ne l'a pas demandé et même si le tribunal ne l'a pas prononcé Selon l'article L. 211-13 du Code des assurances, lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis à l'article L. 211-9, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.
Voir : sur la capitalisation des intérêts, la rubrique "Anatocisme" et sur les intérêts calculés au taux doubles voir : Assurance et les mots prêt et Consommation (Droit de la -)
Textes
Bibliographie