par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
LEGS DEFINITION
Dictionnaire juridique
Définition de Legs
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Le "legs" est une gratification consentie par testament. Le legs, porte en général dérogation aux règles légales de la dévolution successorale. Le but du testateur est soit d'attribuer tout ou partie de sa succession à une personne qui n'y était pas normalement appelée, soit d'attribuer à un de ses héritiers légaux une part d'un montant excédant la part d'héritage que la loi lui réserve. Le bénéficiaire d'un legs est appelé le " légataire ". Le légataire est dit "légataire universel" lorsqu'il est gratifié de l'ensemble des biens, droits et actions que le testateur laisse à son décès. Si ce dernier ne lui lègue qu'une partie ou une fraction de son patrimoine, le bénéficiaire du legs est dit "légataire à titre universel".
En cas d'atteinte à la réserve héréditaire, l'indemnité de réduction doit être calculée, selon les termes de l'article 924-2 du Code civil, d'après la valeur des biens donnés ou légués à l'époque du partage et en fonction de leur état au jour où la libéralité a pris effet. Il résulte des articles 1004 et 1005 du code civil qu'en présence d'héritiers réservataires, à défaut d'une demande de délivrance dans l'année du décès, le legs ne prend effet que du jour de la demande en justice ou de celui de la délivrance volontairement consentie. (1ère Chambre civile 28 mai 2015, pourvoi n°14-15115, BICC n°831 du 15 novembre 2015 et Legifrance). Selon l'article 921, alinéa 1er, du code civil, la réduction des dispositions entre vifs ne peut être demandée que par ceux au profit desquels la loi fait la réserve, par leurs héritiers ou ayants cause. Si un légataire a cédé ses droits successifs la personne qui est bénéficiaire de cette cession a la qualité d'ayant cause de l'héritière réservataire, elle peut demander la réduction des legs qui ont été consentis. (1ère Chambre civile 25 octobre 2017 pourvoi n°16-20156, BICC n°877 du 1er mars 2018 et Legifrance).
La générosité du testateur en faveur du ou des bénéficiaires des libéralités, se trouve limitée par les droits des héritiers réservataires auxquels le loi attribue une part d'une quotité minimale dont le testateur ne peut librement disposer. S'il le faisait en passant outre aux droits des héritiers à réserve, la part des personnes qui auraient été gratifiées au mépris du droit d'un héritier réservataire pourrait être réduite par un jugement. L'aliénation du bien légué par le tuteur d'un majeur en tutelle constitue une perte totale de la chose léguée entraînant la caducité du legs au sens de l'article 1042 du code civil. (1ère Chambre civile 7 juin 2006, BICC n°648 du 15 octobre 2006).
Les libéralités consenties par un époux à son conjoint ne peuvent préjudicier à la réserve des héritiers, de sorte que le conjoint survivant ne peut bénéficier du cumul de ses droits légaux avec la libéralité consentie en application de l'article 1094 du code civil lui octroyant un droit plus étendu. L'époux survivant ne peut recevoir une portion de biens supérieure, soit à la quotité disponible en faveur d'une personne étrangère, soit au quart en pleine propriété et aux trois quart en usufruit, soit tencore à la totalité des biens en usufruit seulement (1ère Chambre civile 25 octobre 2017, pourvoi n°17-10644, BICC n°877 du 1er mars 2018 et Legifrance). Consulter la note de M. Gwennaël François, JCP 2017, éd. S. Act. n°309 et II, 1389.
La liberté du testateur se trouve également limitée par le fait que certaines personnes sont déclarées par la loi, incapables soit de donner, soit de recevoir. La loi déclare nulle les substitutions dans le but d'éviter notamment que le stipulant ne procède à une simulation en ne désignant une personne donnée, que dans l'intention de gratifier un tiers que la loi déclare inapte à hériter. Certaines exceptions à cette règle sont cependant admises. (voir le mot "fideicommis"). Les juges du fond apprécient souverainement la qualité de médecin traitant et les éléments constitutifs d'un traitement médical au sens de l'article 909 du code civil. Dans l'exercice de ce pouvoir souverain les juges du second degré, par motifs propres et adoptés, peuvent estimer que l'assistance apportée par M. un médecin au défunt, en raison tant des liens affectifs anciens et profonds qui l'unissaient au malade que de sa compétence professionnelle, ne pas constitue pas un traitement médical. En particuler il peuvent estimer qu'il n'est pas établi que le médecin a prodigué au défunt des soins réguliers et durables pendant la maladie dont ce dernier est décédé. Dans ce cas, il peuvent déduire de ce qui précède, que ce médecin peut profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires dont le défunt l'a gratifié (1ère Chambre civile 15 janvier 2014, pourvoi : 12-22950, BICC n°799 du 1er avril 2014 et Legifrance).
On nomme "legs de residuo", la disposition testamentaire par laquelle le legs conféré à une personne est fait sous la condition qu'à son décès, elle transmette à son tour par testament, à une tierce personne que le testateur désigne, ce que le légataire ainsi avantagé aura conservé des biens qui lui ont été légués. Le legs de residuo est soumis à la double condition que, d'une part, au décès du premier légataire institué, la chose léguée subsiste dans son patrimoine et que, d'autre part, le second légataire lui ait survécu. En cas de réalisation de la condition, seul le second légataire est tenu des dettes et charges de la succession du testateur. La Première Chambre de la Cour de cassation a jugée le 8 février 2005 (1ère CIV. - 8 février 2005, BICC n°620 du 1er juin 2005) que viole les articles 870 et 871 du Code civil une cour d'appel qui énonce que les dettes et charges d'une succession doivent être supportées, chacun pour sa part et portion, par l'héritier du premier légataire et par le second légataire, bénéficiaire d'un legs de residuo, alors qu'au décès du premier légataire, le second légataire a recueilli l'intégralité des biens restant de la succession du testateur et l'héritier du premier légataire les seuls biens composant la succession de son auteur.
A partir du 1er janvier 2007, la Loi n°2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités, permet sous l'appellation de "libéralités résiduelles" qu'une personne puisse être appelée à recueillir ce qui subsistera du don ou legs fait à un premier gratifié à la mort de celui-ci. Ce mécanisme n'oblige pas le premier gratifié à conserver les biens reçus. Elle l'oblige à transmettre les biens subsistants. Le premier gratifié ne peut disposer par testament des biens donnés ou légués à titre résiduel et la libéralité résiduelle peut interdire au premier gratifié de disposer des biens par donation entre vifs.
Alors que l'héritier unique ou le légataire universel qui ne se trouve pas en présence d'héritiers à réserve est saisi de plein droit desbiens qui lui sont dévolus, le légataire qui se trouve en présence d'héritiers à réserve doit leur en demander la délivrance (article 1004 et suivants du Code civil) après avoir obtenu une ordonnance d'envoi en possession.
Concernant les legs entre époux, voir le mot : Quotité disponible.
Textes
Bibliographie