par Serge Braudo
Conseiller honoraire à la Cour d'appel de Versailles
BATONNIER DEFINITION
Dictionnaire juridique
Définition de Bâtonnier
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Le "Bâtonnier de l'Ordre" est l'avocat élu pour deux ans par l'assemblée générale des avocats inscrits au barreau institué dans le ressort de chaque Tribunal de grande instance (actuellement nommé Troibunal judiciaire), pour assurer la présidence du Conseil de l'ordre. L'origine du mot "Bâtonnier" vient probablement de ce qu'autrefois cet avocat disposait seul du pouvoir disciplinaire à l'égard de ses confrères. C'était lui qui au Moyen Age était chargé de porter la hampe (barreau) de la bannière de la Confrérie de Saint Nicolas à laquelle appartenaient les avocats.
Le Bâtonnier a aussi la charge de tenter de résoudre les conflits qui peuvent opposer des avocats. A cet égard, s'il lui appartient de régler les différends existant entre avocats il revient à la seule juridiction saisie de décider, en cas de contestation, des pièces pouvant être produites devant elle (1ère Chambre civile 15 décembre 2011, pourvoi n°10-25437, BICC n°759 du 1er avril 2012 et Legifrance). Consulter ma note de M. Avril référencée dans la Bibliographie ci-après.
Le décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021, clarifie les règles de procédure civile relatives à l'assignation à date, rétablit la possibilité de procéder au dépôt du dossier en procédure écrite, précise l'articulation entre l'obligation de tenter un mode alternatif de règlement des différends préalable à la saisine du juge et la possibilité de saisir la juridiction d'une demande de conciliation ainsi que les dérogations au principe de la représentation obligatoire par avocat devant le tribunal de commerce. Le décret simplifie en outre la procédure d'injonction de payer en prévoyant que l'ordonnance portant injonction de payer est immédiatement revêtue de la formule exécutoire. Il supprime par ailleurs le caractère automatique de la purge des vices de procédure et fins de non-recevoir lors de la conclusion d'une convention de procédure participative et confère à l'expertise décidée dans ce cadre une valeur identique à celle de l'expertise judiciaire. De plus, le décret prévoit que certaines décisions rendues par le bâtonnier peuvent de plein droit être rendues exécutoires nonobstant l'existence d'un recours et que le bâtonnier pourra prévoir une telle possibilité, le cas échéant en fixant des conditions et garanties prévues par le code de procédure civile.
Les dispositions auxquels renvoie l'article 179-6 du même décret relatif à l'appel des décisions d'arbitrage rendues pour le règlement des différends entre avocats dans leur exercice professionnel, ne définissent les mentions que doit contenir la déclaration d'appel et les sanctions qu'entraîne leur irrégularité. Selon l'article 277 du décret précité, il est procédé comme en matière civile pour tout ce que le décret ne règle pas. Dès lors, une cour d'appel a énoncé, à bon droit, que la déclaration d'appel contre les décisions d'arbitrage du bâtonnier devait comporter les mentions prescrites par l'article 58 du code de procédure civile, conformément à l'article 933 du même code, régissant la procédure contentieuse sans représentation obligatoire à laquelle ces décisions ressortissent (1ère Chambre civile 9 juin 2017, pourvoi n°15-29346, BICC n°872 du 1er décembre 2017 et Legifrance).
Etant porté devant le premier président de la cour d'appel, le recours formé, en application de l'article 176 du décret du 27 novembre 1991, contre la décision du bâtonnier statuant en matière de contestations d'honoraires et débours n'entre pas dans le champ d'application de l'arrêté du Garde des sceaux du 5 mai 2010, relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel, tel que fixé par son article 1er. (2e Chambre civile 6 septembre 2018, pourvoi n°17-20047, BICC n°894 du 15 janvier 2019 et Legifrance). De ùmême, le bâtonnier et, sur recours, le premier président, n'ont pas le pouvoir de connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l'avocat à l'égard de son client résultant d'un manquement à son devoir de conseil et d'information. (2e Chambre civile 16 juillet 2020, pourvoi n°19-18145, Legifrance).
La voie de la tierce opposition, qui tend non seulement à faire rétracter le jugement attaqué, mais également à le réformer, n'est pas ouverte contre la décision du bâtonnier saisi d'une contestation d'honoraires. (2e Chambre civile 5 mars 2020, pourvoi n°18-24430, Legifrance).
Le bâtonnier préside l'Assemblée générale et le Conseil de l'ordre des avocats. Il désigne ceux de ses confrères qui doivent être commis d'office, notamment dans le cadre de l'Aide juridictionnelle. Il règle les incidents qui peuvent de produire entre les avocats, notamment lorsque le différend qui les opposent est né de l'exécution d'une convention de collaboration, et il règle pareillement les litiges qui peuvent surgir entre un avocat et son client, particulièrement lorsque le litige porte sur à la fixation du montant des honoraires. Il peut aussi réunir le Conseil de l'ordre quand celui ci doit se constituer en Conseil de discipline. En revanche il est jugé que dans le silence des textes, la Bâtonnier ne dispose pas du pouvoir d'infliger à un avocat une admonestation, dès lors que cette mesure est inscrite au dossier individuel, car elle constitue alors une véritable sanction faisant grief et, partant, elle est soumise à recours. (1ère Civ. - 7 mai 2008 BICC n°688 du 1er octobre 2008). Mais, l'admonestation infligée à un avocat qui n'est pas inscrite au dossier individuel de l'avocat, ne constitue pas une sanction qui, comme telle, ferait grief. Elle constitue une simple remontrance sans condition de forme ou de procédure particulière que le bâtonnier est en droit d'adresser à un avocat pris en défaut (1ère Chambre civile 16 mai 2012, pourvoi n°11-13854, BICC n°770 du 1er novembre 2012 et Legifrance).
Selon les articles 15, alinéa 6, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et 12, alinéas 1er et 2, du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'élection du bâtonnier peut être déférée à la Cour d'appel par les avocats disposant du droit de vote, dans le délai de huit jours qui suivent ces élections. Si, conformément à l'article 16, alinéa 4, du même décret qui édicte les règles de procédure applicables à tous les recours, y compris ceux relatifs aux élections ordinales, la Cour d'appel statue après avoir invité le bâtonnier à présenter ses observations qui, contrairement au conseil de l'ordre, n'est pas une partie à l'instance, ce texte ne fait pas obstacle à ce qu'en matière d'élections ordinales, le bâtonnier en exercice, chargé, en application de l'article 24 du décret, de l'organisation des opérations électorales et du dépouillement des votes, formule ses observations sous la forme de conclusions communes au conseil de l'ordre (1ère Chambre civile 24 octobre 2019, pourvoi n°18-10553, BICC n°918 du 15 mars 2020 et Legifrance). Le bâtonnier en exercice d'un barreau du ressort du centre régional de formation professionnelle, qui ne peut participer aux réunions du conseil d'administration avec voix délibérative ni même assister au vote des délibérations portant sur le budget du centre, ne peut être désigné comme membre du conseil d'administration en tant qu'avocat titulaire (1ère chambre civile, 28 mai 2009, pourvoi n°08-16326 et 08-16327, BICC n°711 du 15 novembre 2009 et Legifrance).
Une action disciplinaire peut être engagée à l'initiative du Bâtonnier. Il tient des dispositions de l'article 187 du décret 91-1197 du 27 novembre 1991 la faculté de faire procéder ou de procéder lui-même, de sa propre initiative à une enquête sur le comportement d'un avocat de son barreau. Tel est le cas lorsque le bâtonnier constate que l'avocat a fait l'objet de diverses réclamations dont celle du bailleur du local professionnel de ce dernier se déclarant impayé de loyers et charges et qu'il est impossible de le joindre (1ère Chambre civile 17 octobre 2012, pourvoi n°11-17999, BICC n°776 du 15 février 2013 et Legifrance). Le Conseil de l'ordre se réunit en conseil de discipline. La procédure préalable est généralement confiée à des membres du conseil de l'ordre désignés comme rapporteurs chargés de l'instruction. Bien qu'ils ne participent pas à la formation de jugement, l'exigence d'impartialité prévue à l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, s'impose cependant aux rapporteurs qui ont pour mission de procéder à une instruction objective et contradictoire de l'affaire et dont le rapport obligatoire est déterminant du sort ultérieurement réservé aux poursuites par la formation de jugement (1ère chambre civile, 2 avril 2009, pourvoi n°08-12246, BICC n°710 du 1er novembre 2009, et Legifrance). Au surplus, au visa des articles 197 et 16 du décret du 27 novembre 1991, la première Chambre de la Cour de cassation a jugé qu'il résultait de la combinaison de ces textes qu'en matière disciplinaire, le conseil de l'ordre des avocats ne pouvait être partie dans l'instance d'appel (1ère chambre civile, 28 mai 2009, pourvoi n°08-13089, BICC n°711 et Legifrance).
Le bâtonnier, autorité de poursuite, ne participe ni à l'instruction de l'affaire ni à la délibération du conseil de discipline, de sorte que les relations conflictuelles qu'il peut avoir entretenues avec l'avocat poursuivi ne sont pas de nature à remettre en cause l'impartialité du conseil de discipline (1ère Chambre civile 5 juillet 2017, pourvoi n°16-21768, Legifrance).
Sur le fondement de l'article 22-1 de la loi du 31 décembre 1971, les délibérations des Conseils de l'ordre prises en application du premier alinéa, relatif à la composition du conseil de discipline institué dans le ressort de chaque cour d'appel, et l'élection du président du conseil de discipline peuvent être déférées à la Cour d'appel.
Un Décret n°2009-1233 du 14 octobre 2009 a créé la fonction de "vice-bâtonnier". L'opportunité de la désignation d'un vice-bâtonnier au sein du Conseil de l'ordre est fonction de l'importance du nombre d'avocats inscrits. On peut penser qu'une telle charge n'est concevable que devant les tribunaux importants. Sa candidature est présentée par le bâtonnier dans le même temps qu'il présente la sienne. La durée de son mandat est lié à celle de ce dernier. Il siège en qualité de membre du Conseil de l'ordre. Le bâtonnier peut lui déléguer une partie de ses pouvoirs.
Tout avocat disposant du droit de vote peut déférer à la Cour d'appel l'élection du bâtonnier et des membres du Conseil de l'ordre par une réclamation formée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au greffe ou remise contre récépissé au greffier en chef, à charge pour l'intéressé d'en aviser sans délai le procureur général et le bâtonnier par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'il ressort de cette disposition qu'il incombe au juge d'avertir les élus dont l'élection est contestée et de les faire convoquer en temps utile par le greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Si la Cour d'appel, statue sur le recours en annulation du scrutin, sans convocation préalable de l'élu dont l'élection est contestée, elle méconnaît les dispositions des articles 14 du code de procédure civile et 12 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991. (1ère Chambre civile 16 avril 2015, pourvoi n°14-14309, BICC n°829 du 15 octobre 2015 et Legifrance).
Ayant relevé que le scrutin binominal majoritaire à deux tours est manifestement inadapté à l'élection du bâtonnier, une cour d'appel a exactement décidé que les dispositions de l'article 6 du décret du 27 novembre 1991 restent applicables à l'organisation de ce vote, la mention « dans les mêmes conditions », énoncée par l'article 8 de l'ordonnance du 31 juillet 2015, précitée, se rapportant seulement à la désignation des électeurs, qui sont les avocats inscrits au barreau et les avocats honoraires, dès lors que l'exigence d'un tel scrutin, destinée à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des instances ordinales, n'a de sens que pour le renouvellement des membres du conseil de l'ordre (1ère Chambre civile 11 mai 2017, pourvoi n°16-15549; BICC n°870 du 1er novembre 2017 et Legifrance). Consulter la note de MMe Daniel Landry et Jean Villacèque, JCP 2017, éd. G., II, 695.
Le juge de l'élection, saisi d'un recours en annulation du bâtonnier et du Vice Bâtonnier a pour mission de contrôler la régularité et la sincérité du scrutin. A cet effet, il vérifie les mentions du procès-verbal des opérations de vote au moyen du matériel et des documents électoraux qui doivent être conservés par l'autorité responsable du bon déroulement du scrutin. Dans le cas où le bâtonnier en exercice a détruit le matériel et les documents électoraux et que cette destruction a eu lieu avant l'expiration du délai de recours ouvert au Procureur général, une telle initiative a fait obstacle au contrôle du juge de l'élection, de sorte qu'en retenant que le bâtonnier n'avait commis aucune faute, la cour d'appel a violé les textes applicables en la matière (1ère Chambre civile 5 avril 2018, pourvoi n°17-27423, BICC n°888 du 1er octobre 2012 et Legifrance). Consulter Dominique Piau, Gaz. Pal. 2018, n°17, p. 16.
Lorsque le bâtonnier de l'ordre des avocats est désigné comme séquestre, il a la qualité de tiers saisi dans la saisie-attribution et les saisies conservatoires portant sur le prix d'adjudication de l'immeuble consigné entre ses mains. Il en résulte que la responsabilité de la CARPA ne pouvait être recherchée au titre des obligations pesant sur le tiers saisi. (2e Chambre civile 17 mars 2016, pourvoi n°14-16985 14-18692, BICC n°846 du 15 juillet 2016 et Legifrance).
Textes.
Bibliographie.